Le ministère des Transports, des Voies de communication et du Désenclavement vient de lancer un appel à manifestation d’intérêt international d’envergure pour la construction d’une usine d’assemblage et de montage de trains en République Démocratique du Congo. Cette initiative stratégique, officialisée par le vice-premier ministre Jean-Pierre Bemba Gombo, marque un tournant décisif dans la politique industrielle du pays.
Le projet ferroviaire Congo se positionne comme une réponse structurelle aux défis de mobilité qui entravent le développement économique national. Comment la RDC peut-elle transformer son vaste potentiel minier en véritable richesse partagée sans un réseau de transport performant ? La réponse pourrait bien se trouver dans cette usine dont l’implantation est envisagée soit à Matadi, porte océanique du pays, soit à Kalemie, carrefour stratégique du Tanganyika.
Le modèle retenu – un partenariat public-privé d’une durée de 25 à 30 ans – témoigne d’une approche pragmatique combinant expertise internationale et vision nationale. Le calendrier est déjà tracé : les entités intéressées disposent jusqu’au 5 décembre 2025 pour soumettre leurs dossiers, tandis que des visites de sites sont programmées avant le 25 novembre 2025.
L’analyse économique révèle l’urgence de cette initiative. Avec un réseau ferroviaire de près de 5.000 kilomètres dont plus de la moitié est aujourd’hui non opérationnelle, la RDC subit une hémorragie financière continue. L’obsolescence des équipements et le manque d’entretien transforment ce qui devrait être un atout compétitif en facteur de ralentissement économique. La dépendance aux importations de matériel roulant alourdit considérablement la balance commerciale et limite l’autonomie stratégique du pays.
La construction locomotives Matadi ou Kalemie représenterait bien plus qu’une simple unité de production. Elle s’inscrit dans une vision globale de relance industrielle créatrice de valeur ajoutée locale. Les retombées attendues dépassent largement le cadre ferroviaire : création d’emplois qualifiés, transfert de technologies, développement de sous-traitance locale et renforcement des compétences nationales.
Les critères d’évaluation des partenaires potentiels reflètent cette ambition multidimensionnelle. Au-delà de la solidité financière et de l’expérience industrielle, le gouvernement accorde une importance cruciale au transfert de technologie et au modèle de gouvernance proposé. Le choix du français comme langue de travail et du dollar américain comme devise de référence facilite l’intégration internationale tout en préservant les spécificités régionales.
La modernisation réseau ferroviaire constitue l’un des piliers du programme de relance économique congolais. Le réseau historique, hérité de l’époque coloniale et reliant les provinces minières du sud-est au port de Matadi, nécessite une transformation profonde. Les connexions régionales avec la Zambie, l’Angola et la Tanzanie représentent autant d’opportunités de développement économique transfrontalier.
Le partenariat public-privé transports envisagé s’apparente à une métaphore économique parlante : l’État fournit les rails de la stabilité institutionnelle tandis que les investisseurs privés apportent la locomotive de l’innovation et de l’efficacité opérationnelle. Cette synergie public-privé pourrait constituer le modèle de référence pour les futures infrastructures stratégiques en RDC.
Quels défis attendent les futurs partenaires ? La complexité technique bien sûr, mais également l’impératif d’intégration dans l’écosystème économique local et la nécessité de former une main-d’œuvre qualifiée. La réussite de ce projet dépendra de la capacité des différents acteurs à conjuguer leurs compétences respectives au service d’une vision commune.
À l’horizon 2030, cette usine d’assemblage pourrait transformer radicalement le paysage économique congolais. En réduisant la dépendance aux importations, en créant des emplois stables et en facilitant le transport des marchandises, elle contribuerait à une croissance économique plus inclusive et durable. Le réseau ferroviaire retrouverait alors sa vocation première : être le vecteur du développement national et régional.
La date limite du 5 décembre 2025 approche à grands pas. Constructeurs ferroviaires, sociétés d’ingénierie, entreprises BTP et investisseurs institutionnels ont désormais l’opportunité d’écrire ensemble une nouvelle page de l’histoire industrielle congolaise. Le succès de cette entreprise déterminera en grande partie la capacité de la RDC à maîtriser son destin économique et à affirmer sa souveraineté industrielle.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
