Les cahiers sont rangés, les bancs vides. À Mutombo Ngindu, petit village situé à 20 kilomètres de Kananga, le silence inhabituel qui règne dans l’école Kuatshila Muana Mpasu raconte une tragédie éducative. « Nos enfants errent dans le village depuis que la pluie a tout détruit », témoigne un parent d’élève, la voix chargée d’émotion. Comment une simple averse peut-elle anéantir l’avenir de toute une communauté ?
La semaine dernière, des pluies diluviennes se sont abattues sur la région du Kasaï-Central, emportant la toiture de l’établissement scolaire et provoquant l’effondrement des murs. Cet effondrement d’école à Kananga laisse derrière lui un paysage de désolation et une centaine d’élèves privés d’éducation. L’école Kuatshila Muana Mpasu, unique établissement du village, n’est plus que ruines.
« Avant, nous entendions les enfants chanter et étudier. Maintenant, il n’y a plus que le bruit du vent qui passe à travers les fissures », se désole un enseignant. La situation à Kuatshila Muana Mpasu illustre cruellement la précarité du système éducatif dans cette région de la RDC. Les bâtiments, déjà vétustes et dépourvus de bancs pupitres dignes de ce nom, n’ont pas résisté à la violence des intempéries.
La conseillère municipale de Lukonga, Alexandre Tshiama, ne cache pas son inquiétude : « Je lance un SOS aux autorités locales, au gouvernement national et aux partenaires techniques et financiers. Cette école forme les élites de demain. Comment pouvons-nous abandonner nos enfants ainsi ? » Son appel résonne comme un cri d’alarme dans une région où l’accès à l’éducation relève déjà du parcours du combattant.
La crise éducation RDC prend ici une dimension particulièrement dramatique. Les élèves de Mutombo Ngindu se retrouvent confrontés à un dilemme insoluble : rester sans éducation ou parcourir quotidiennement 5 kilomètres pour rejoindre l’établissement le plus proche. « Mes enfants sont trop jeunes pour marcher autant. Et comment assurer leur sécurité sur ces chemins ? », s’interroge une mère de famille.
Les pluies Kasaï-Central, de plus en plus fréquentes et violentes ces dernières années, mettent en lumière la vulnérabilité des infrastructures scolaires dans la région. Cet incident s’inscrit dans une série de catastrophes similaires, comme récemment à Lubao où environ 1000 personnes se sont retrouvées sans abri après des intempéries.
Les enseignants, désœuvrés, se tournent les pouces en attendant une solution miracle. « Nous avons consacré notre vie à l’éducation de ces enfants. Les voir ainsi privés d’école nous brise le cœur », confie l’un d’eux. La communauté s’organise tant bien que mal, mais sans moyens, les initiatives restent limitées.
Cette situation des élèves sans école Mutombo Ngindu pose une question fondamentale : jusqu’à quand l’éducation restera-t-elle le parent pauvre des politiques publiques dans cette région ? Alors que la RDC aspire au développement, comment peut-on construire l’avenir sans investir dans les salles de classe ?
Les partenaires techniques et financiers sont interpellés, tout comme les autorités à tous les niveaux. La reconstruction de l’école Kuatshila Muana Mpasu représente bien plus que la simple réhabilitation d’un bâtiment : c’est la restauration de l’espoir pour toute une génération. Dans un pays où l’éducation représente l’unique échappatoire pour de nombreuses familles, chaque jour sans école creuse un peu plus le fossé des inégalités.
La balle est désormais dans le camp des décideurs. Entre les promesses et la réalité du terrain, les parents d’élèves attendent des actes concrets. Car derrière les murs effondrés de l’école Kuatshila Muana Mpasu, ce sont des rêves d’enfants et l’avenir de toute une communauté qui sont en jeu.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
