La nuit du samedi 12 octobre a marqué un drame sanitaire de plus dans la région de Walikale, où une jeune mère a perdu la vie des suites d’une hémorragie post-accouchement. La cause principale de ce décès évitable ? La pénurie criante de produits sanguins qui frappe l’hôpital général de référence de cette localité du Nord-Kivu.
Comment en sommes-nous arrivés à cette situation alarmante où des vies s’éteignent par manque d’une ressource aussi vitale que le sang ? L’établissement hospitalier, pourtant classé comme structure de référence, ne dispose plus des réserves nécessaires pour faire face aux urgences médicales. La consommation quotidienne s’élève à environ 15 poches de sang, alors que la capacité de collecte ne dépasse pas les 5 poches par jour.
Les conséquences de cette pénurie de sang à Walikale sont particulièrement dramatiques pour deux populations vulnérables : les enfants atteints de paludisme sévère avec anémie et les femmes lors de leur accouchement. Ces dernières, confrontées à des hémorragies parfois imprévisibles, se retrouvent sans solution transfusionnelle immédiate. Le cas du décès survenu ce week-end n’est malheureusement pas isolé, mais s’inscrit dans une série de tragédies similaires.
Face à cette crise transfusionnelle au Nord-Kivu, l’Association des Donneurs de Sang de Walikale tente de maintenir une activité minimale. Cependant, ses membres reconnaissent leur impuissance devant l’ampleur des besoins. « Nous faisons ce que nous pouvons, mais la demande dépasse largement nos capacités », confie un responsable de l’association sous couvert d’anonymat.
Les autorités sanitaires locales avaient pourtant anticipé le problème en lançant, il y a plus de trois mois, une campagne de sensibilisation au don bénévole de sang. Mais les résultats restent insuffisants. Comment expliquer cette difficulté à mobiliser les donneurs potentiels ? La méconnaissance des procédures, les croyances populaires et le manque d’information semblent être les principaux obstacles.
La situation s’est encore aggravée avec les récents développements sécuritaires dans la région. Avant l’occupation de Goma par la rébellion du M23, l’hôpital de Walikale bénéficiait d’un approvisionnement régulier par le Centre Provincial de Transfusion Sanguine de Goma, avec l’appui de Médecins Sans Frontières. Cette bouée de sauvetage s’est rompue, plongeant l’établissement dans une dépendance totale vis-à-vis des dons locaux.
Que faire face à cette urgence humanitaire ? Les spécialistes de la santé rappellent qu’une poche de sang peut sauver jusqu’à trois vies. Le sang collecté est séparé en trois composants : les globules rouges, les plaquettes et le plasma, chacun servant à traiter des pathologies différentes. Dans le cas des hémorragies du post-partum, ce sont principalement les globules rouges qui sont nécessaires pour restaurer la capacité de transport d’oxygène dans l’organisme.
Les autorités sanitaires lancent un appel pressant aux personnes en bonne santé âgées de 18 à 65 ans à se présenter comme donneurs volontaires. Le processus de don est sécurisé et ne prend qu’environ 45 minutes. Contrairement aux idées reçues, donner son sang ne présente pas de risque pour la santé d’un individu en bonne condition physique.
Au-delà de l’appel aux dons, cette crise met en lumière la nécessité de restructurer en profondeur le système de transfusion sanguine dans cette région. La création d’une banque de sang locale mieux équipée et dotée de moyens de conservation adéquats apparaît comme une solution durable. Des partenariats avec des organisations internationales spécialisées pourraient également permettre de mettre en place un système d’approvisionnement d’urgence.
La tragédie de Walikale nous interpelle tous sur la fragilité de notre système de santé face aux crises multiples. Alors que la RDC continue de faire face à de nombreux défis sanitaires, la question de l’accès aux produits sanguins demeure un enjeu vital qui mérite une attention particulière des décideurs et de la communauté internationale.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd