Dans une communication qui fera date, le président Félix Tshisekedi a réactivé avec une intensité remarquable le combat pour la reconnaissance internationale du GENOCOST Congo. Lors du Conseil des ministres, le Chef de l’État a déployé une rhétorique aussi ferme que calculée, rappelant que cette bataille mémorielle dépasse largement le cadre des seules réparations pour s’inscrire dans une quête plus fondamentale : celle de la vérité historique et de la justice.
Comment la communauté internationale pourra-t-elle continuer à ignorer l’ampleur de cette tragédie ? La question plane désormais comme une épée de Damoclès au-dessus des chancelleries occidentales. Le président congolais, par un habile jeu diplomatique, a personnellement porté ce combat jusqu’à la tribune des Nations Unies, transformant ce qui était jusqu’alors considéré comme une affaire congolaise en un enjeu de conscience universelle.
La loi n°22/65 du 26 décembre 2022, qui consacre le 2 août comme journée nationale du GENOCOST, représente bien plus qu’une simple disposition légale. Elle constitue le socle institutionnel d’une mémoire collective que Kinshasa entend désormais imposer dans le récit national. Le timing de cette relance n’est certainement pas anodin : à trois ans des premières commémorations, le gouvernement affûte ses armes pour une offensive diplomatique d’envergure.
« La bataille pour la reconnaissance du GENOCOST ne saurait se limiter aux seules démarches diplomatiques », a martelé le président, dans une phrase qui résume toute l’ambiguïté de sa position. D’un côté, il mobilise l’appareil étatique pour une reconnaissance internationale ; de l’autre, il sait pertinemment que sans l’appropriation populaire, ce combat restera lettre morte. Cette dualité stratégique témoigne d’une fine compréhension des enjeux mémoriels.
L’instruction donnée aux ministres de l’Éducation nationale, de la Formation professionnelle et de l’Enseignement supérieur révèle la profondeur de la démarche. Intégrer la mémoire du GENOCOST dans le système éducatif, de la maternelle à l’université, constitue une manœuvre politique d’une rare audace. C’est préparer les générations futures à porter un récit national qui, pour l’heure, peine encore à s’imposer dans la conscience collective congolaise.
La vulgarisation dans les quatre langues nationales et l’inscription dans les curricula scolaires représentent les deux piliers d’une entreprise de réécriture mémorielle sans précédent. Le gouvernement joue ici sur tous les tableaux : formation des consciences jeunes et mobilisation des adultes through des canaux linguistiques familiers. Une stratégie qui pourrait bien s’avérer payante à moyen terme.
Mais le véritable enjeu réside peut-être ailleurs : dans la capacité de Kinshasa à transformer cette mémoire douloureuse en levier de construction nationale. Le président l’a bien compris lorsqu’il évoque la nécessité d’« écarter tout discours de haine ou repli xénophobe ». La reconnaissance génocide congolais doit servir de ciment unitaire plutôt que de facteur de division.
La référence oblique au génocide rwandais et aux responsabilités internationales n’est certainement pas fortuite. En rappelant le « devoir moral et politique » de la communauté internationale, Félix Tshisekedi place ses partenaires étrangers devant leurs responsabilités historiques. Un calcul risqué, mais qui pourrait forcer des prises de position longtemps différées.
Le chemin vers la reconnaissance internationale du GENOCOST Congo reste semé d’embûches. Les résistances diplomatiques, les enjeux géostratégiques et la complexité du dossier juridique constituent autant d’obstacles que le gouvernement devra surmonter. Mais la détermination affichée par le président, couplée à une stratégie à la fois institutionnelle et populaire, pourrait bien changer la donne.
La transmission de cette mémoire aux générations futures s’annonce comme le véritable test de crédibilité de cette entreprise mémorielle. Si les manuels scolaires parviennent à porter ce récit sans tomber dans l’instrumentalisation politique, alors le GENOCOST aura peut-être une chance de trouver sa place dans la mémoire universelle. Mais gare aux récupérations : l’histoire congolaise est trop souvent devenue l’otage des calculs politiciens.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd