La tension atteignait son paroxysme à Mayangose. Vingt hectares de cultures réduits en cendres par les écogardes de l’ICCN, des paysans désemparés face à leurs champs dévastés, et une forêt en détresse qui paie le prix fort de ce conflit homme-nature. Le Parc national des Virunga, ce joyau écologique du Nord-Kivu, devient le théâtre d’une crise environnementale et sociale aux conséquences imprévisibles.
Comment en est-on arrivé à cette situation explosive ? La zone tampon de Tingitingi, cette terre fertile aux abords du parc, cristallise toutes les tensions. D’un côté, des paysans en lutte pour leur survie quotidienne, de l’autre, des écogardes déterminés à protéger coûte que coûte cette réserve naturelle classée au patrimoine mondial. La destruction des champs dans le village de Bapakombe-Bakondo avait créé un climat de défiance insoutenable.
Le compromis trouvé le 30 septembre dernier sous l’égide du gouverneur provincial apparaît comme une bouffée d’oxygène dans ce contexte tendu. L’autorisation de cultiver des produits vivriers non pérennes représente-t-elle une avancée significative ou un simple pansement sur une jambe de bois ? Le Mwami Achu Daibo, autorité traditionnelle respectée, souligne l’importance de cette décision : « Nous devons rester attentifs et obéissants, dans l’espoir d’aboutir à une conservation participative et non policière ».
Mais derrière cette trêve apparente se cache une réalité plus complexe. Le conflit entre écogardes et paysans à Mayangose n’est que la partie émergée d’un iceberg bien plus menaçant. La pression démographique, la pauvreté endémique et les besoins alimentaires croissants poussent inexorablement les communautés riveraines à empiéter sur les zones protégées. Le Parc Virunga agriculture devient un enjeu de survie immédiate face à la conservation à long terme.
La solution durable tant attendue passera nécessairement par le forum annoncé, qui réunira autorités nationales et locales. Cette approche inclusive pourrait marquer un tournant décisif dans la gestion des aires protégées en RDC. La conservation participative Nord-Kivu représente-t-elle l’avenir de la protection environnementale dans la région ? Les prochains jours, avec la publication du rapport du Groupe Consultatif de Médiation, apporteront des éléments de réponse cruciaux.
Les cultures vivriers Tingitingi, au cœur du différend, symbolisent ce fragile équilibre à trouver entre sécurité alimentaire et préservation écologique. Le parc des Virunga, poumon vert essentiel à l’équilibre climatique régional, ne peut être sacrifié sur l’autel des besoins immédiats. Mais les populations locales, premières concernées par cette richesse naturelle, ne peuvent non plus être marginalisées dans sa gestion.
Cette crise à Mayangose sonne comme un avertissement : la protection de l’environnement ne peut se faire contre les populations, mais doit impérativement se construire avec elles. L’urgence écologique rencontre ici l’urgence sociale, créant un cocktail explosif qui nécessite une approche nuancée et concertée. La réponse apportée à ce conflit local pourrait bien déterminer l’avenir de la conservation dans toute la région des Grands Lacs.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net