La zone de santé de Kibua, située dans le territoire de Walikale au Nord-Kivu, fait face à une situation sanitaire alarmante qui menace directement la vie de milliers de personnes. Comment une région entière peut-elle se retrouver privée de médicaments essentiels en 2024 ? La réponse réside dans un enchevêtrement complexe de défis logistiques et sécuritaires qui paralyse l’accès aux soins de base.
Depuis plusieurs mois, les vingt aires de santé composant cette zone connaissent une rupture totale de médicaments essentiels. Cette pénurie critique compromet la prise en charge des maladies les plus courantes dans la région, exposant particulièrement les populations vulnérables à des risques sanitaires majeurs. Le Dr Yves Tsongo, médecin chef de zone, tire la sonnette d’alarme face à cette crise humanitaire grandissante.
« La rupture de stock est directement liée au retrait des partenaires d’appui », explique le Dr Tsongo avec une inquiétude palpable dans la voix. Imaginez un hôpital sans antibiotiques, sans antipaludéens, sans même les médicaments les plus élémentaires pour traiter les infections courantes. C’est la réalité quotidienne que vivent les centres de santé de Kibua depuis le début de l’année.
La situation s’est particulièrement détériorée depuis que plusieurs organisations non gouvernementales, dont Première Urgence, ne peuvent plus accéder à la zone. L’insécurité persistante, l’état déplorable des routes et le coût prohibitif du transport depuis Goma créent une barrière quasi infranchissable pour l’approvisionnement en médicaments. Comment des traitements vitaux peuvent-ils parvenir aux patients lorsque les routes sont impraticables et les risques sécuritaires omniprésents ?
La présence de la rébellion AFC-M23 dans la région ajoute une couche supplémentaire de complexité à cette crise sanitaire. Les déplacements des équipes médicales et humanitaires deviennent périlleux, freinant considérablement les interventions d’urgence. Cette situation rappelle cruellement l’importance de la sécurité pour garantir l’accès aux soins de santé primaires.
Les structures sanitaires locales, déjà fragilisées, doivent faire face à une augmentation significative des cas de paludisme, de gale et de diarrhée. Sans médicaments appropriés, comment les soignants peuvent-ils remplir leur mission de sauver des vies ? Ces maladies, pourtant évitables et traitables, deviennent potentiellement mortelles en l’absence de prise en charge adéquate.
Le retour progressif des personnes déplacées dans la zone constitue un autre défi majeur. Ces populations, souvent dépourvues de ressources financières, se retrouvent doublement vulnérables : ayant tout perdu lors de leur déplacement, elles n’ont plus les moyens d’accéder aux soins, même lorsque ceux-ci sont disponibles. Comment reconstruire une vie lorsque la santé fondamentale n’est plus garantie ?
Le Dr Tsongo lance un appel pressant aux partenaires humanitaires et aux autorités sanitaires pour une intervention d’urgence. « Nous avons besoin d’une mobilisation immédiate pour éviter une catastrophe sanitaire dans cette région déjà extrêmement fragilisée », insiste-t-il. La situation actuelle représente une véritable course contre la montre pour prévenir des pertes humaines évitables.
Cette crise met en lumière la fragilité des systèmes de santé dans les zones reculées de la RDC. Elle soulève des questions fondamentales sur la résilience des structures sanitaires face aux défis sécuritaires et logistiques. Quelles solutions durables peuvent être mises en place pour garantir un approvisionnement régulier en médicaments essentiels, indépendamment des contraintes sécuritaires ?
La communauté internationale et les autorités nationales doivent urgemment trouver des mécanismes innovants pour assurer la continuité des soins dans ces zones difficiles d’accès. Des solutions alternatives, comme l’utilisation de drones pour le transport de médicaments ou le renforcement des capacités locales de production pharmaceutique, méritent d’être explorées.
En attendant une réponse coordonnée, la population de Kibua continue de vivre au quotidien les conséquences dramatiques de cette rupture de médicaments. Chaque jour sans solution signifie davantage de souffrances et de vies compromises. La rapidité de la réaction des acteurs humanitaires et gouvernementaux déterminera l’ampleur réelle de cette crise sanitaire.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net