Le franc congolais affiche une appréciation notable face au dollar américain, passant d’une fourchette de 2 800-2 900 FC pour 1 USD à 2 600-2 750 FC actuellement. Cette évolution du taux de change en RDC, présentée comme une avancée significative par le gouvernement, soulève cependant des interrogations fondamentales sur sa pérennité et ses réelles retombées économiques.
Lors de la 60ème réunion du conseil des ministres, la Première ministre Judith Suminwa a salué cette tendance comme un facteur positif pour le pouvoir d’achat des Congolais. « Sur le plan de la stabilité macroéconomique, il s’est observé un recul de l’inflation et une appréciation du Franc congolais sur le marché de change », peut-on lire dans le compte-rendu officiel. Le gouvernement attribue cette performance à un ajustement du niveau des réserves obligatoires par la Banque centrale du Congo et à un resserrement budgétaire.
Mais cette politique monétaire de la BCC cache-t-elle une réalité plus complexe ? La cheffe du gouvernement elle-même reconnaît les limites potentielles de cette appréciation, évoquant des risques de réduction des recettes fiscales et d’élargissement du déficit budgétaire. Face à ces préoccupations, la Commission Économie Finances et Reconstruction a été chargée d’approfondir les options de resserrement budgétaire.
Dans l’opposition, le député Delly Sesanga dénonce une baisse « quasi factice » du dollar américain à Kinshasa. Lors d’un meeting à Matete, l’élu a démontré que cette évolution du taux de change n’a pas eu d’impact concret sur le panier de la ménagère, citant plusieurs produits de première nécessité dont les prix sont restés inchangés. Cette critique soulève une question cruciale : une appréciation du franc congolais qui ne se traduit pas par une amélioration tangible du pouvoir d’achat a-t-elle une réelle valeur économique ?
L’analyse du sénateur et économiste Faustin Luanga apporte un éclairage plus technique sur cette situation. « Le franc congolais s’apprécie face au dollar. Bonne nouvelle ? Oui… mais attention au mirage », met en garde l’élu de Maniema. Selon lui, cette appréciation résulterait davantage de facteurs externes – comme la dépréciation mondiale du dollar due aux taux bas américains et à l’instabilité internationale – que de réformes structurelles internes.
Le sénateur Luanga pointe l’absence de diversification économique, de réforme fiscale et d’industrialisation comme autant de faiblesses structurelles qui remettent en cause la solidité de cette appréciation monétaire. « Une monnaie forte sans économie solide est un château de cartes », assène-t-il, appelant à des réformes profondes plutôt qu’à se contenter d’illusions conjoncturelles.
Cette divergence de points de vue révèle les enjeux complexes de la politique monétaire en RDC. Si l’appréciation du franc congolais peut effectivement contribuer à contenir l’inflation et préserver le pouvoir d’achat, son impact réel dépendra de sa durabilité et de sa traduction concrète dans l’économie réelle. La question fondamentale reste : cette évolution favorable du taux de change marque-t-elle le début d’une nouvelle ère économique ou représente-t-elle simplement un répit temporaire dans les défis structurels de la RDC ?
Les prochaines semaines seront déterminantes pour vérifier si cette appréciation du franc congolais face au dollar américain se maintient et si elle produit les effets bénéfiques escomptés sur l’économie congolaise. La coordination entre politique monétaire et budgétaire, ainsi que la mise en œuvre de réformes structurelles, constitueront les véritables tests de cette évolution présentée comme positive par les autorités.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd