Le bruit des moteurs rythme le quotidien de Kisangani, mais depuis vendredi, un nouveau son se fait entendre : celui du changement. Cinq cents conducteurs de moto-taxi viennent de recevoir leurs brevets de participation après une session intensive de recyclage sur les règles élémentaires de sécurité routière. Une initiative de la Commission nationale de prévention routière (CNPR) qui pourrait bien transformer le paysage urbain de la Tshopo.
« Je suis ravi. J’ai compris comment bien me comporter sur la route », confie l’un des bénéficiaires, le visage encore marqué par la concentration des derniers jours de formation. Comme lui, des centaines de chauffeurs ont redécouvert les fondamentaux du code de la route, souvent oubliés dans la précipitation du quotidien. « On nous a aussi conseillé de ne pas boire pendant le travail et de rouler prudemment », ajoute-t-il, conscient désormais des responsabilités qui pèsent sur ses épaules.
Mais pourquoi une telle initiative devenait-elle urgente ? Les accidents de la route impliquant des motos-taxi se multiplient dans la région, créant un sentiment d’insécurité croissant parmi la population. L’ignorance des règles de base, combinée à des comportements à risque, transformait progressivement les artères de Kisangani en terrain miné pour tous les usagers.
Jasmin Yafunga Lokomba, directeur provincial de la CNPR, ne cache pas sa satisfaction : « Ça nous a permis d’atteindre réellement les concernés. La formation a été dispensée en lingala pour une meilleure compréhension. Les participants sortent avec des connaissances adaptées à leur quotidien. » Un choix linguistique judicieux qui a permis de franchir la barrière de la théorie pour toucher directement les pratiques concrètes.
Au programme de ce recyclage en sécurité routière : reconnaissance des signaux routiers, interdiction formelle de conduire en état d’ivresse, maîtrise de la vitesse et respect mutuel entre usagers de la route. Des enseignements qui peuvent sembler élémentaires, mais dont l’absence explique en grande partie l’hécatombe sur les routes de la Tshopo.
Chaque participant repart désormais avec une carte d’identification spéciale, désormais exigée par la Police de circulation routière. Un sésame qui matérialise cet engagement nouveau envers la sécurité de tous. Mais cette première vague de cinq cents conducteurs n’est qu’un début. Dès la semaine prochaine, une nouvelle cohorte prendra le relais dans cette campagne de trois mois qui s’achèvera par une opération de contrôle pour vérifier l’application effective des notions apprises.
Cette formation des conducteurs de moto-taxi représente-t-elle un tournant dans la professionnalisation du secteur ? La question mérite d’être posée alors que des milliers de familles dépendent de cette activité pour leur survie économique. En transformant les pratiques, c’est toute une profession qui gagne en légitimité et en respectabilité.
Le recyclage du code route à Kisangani dépasse largement le cadre d’une simple opération de sensibilisation. Il s’agit d’une véritable refondation des mentalités, d’une reconquête de l’espace public au nom de la sécurité de tous. Les routes de la Tshopo pourront-elles enfin devenir ce lieu de partage et de coexistence pacifique qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être ?
Alors que la deuxième vague de conducteurs s’apprête à suivre le même parcours, une évidence s’impose : la prévention des accidents de moto-taxi nécessite plus qu’une simple formation ponctuelle. Elle exige un engagement durable, une vigilance constante et surtout, la reconnaissance que chaque vie sauvée justifie amplement ces efforts.
L’action de la CNPR en RDC montre la voie : en misant sur l’éducation plutôt que sur la seule répression, en privilégiant le dialogue à la sanction, c’est toute une culture routière qui se transforme progressivement. Reste à présent à espérer que ces graines semées aujourd’hui porteront leurs fruits dans le concret du quotidien kisanganais.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
