Le robinet qui ne coule plus, le seau qui reste vide, la longue marche vers la rivière… Cette réalité quotidienne est devenue le lot des milliers d’habitants du centre commercial de Kibua, au cœur du territoire de Walikale dans le Nord-Kivu. Depuis plusieurs mois, la carence en eau potable transforme la vie de cette communauté en un véritable calvaire hydrique.
« Nos enfants tombent malades, nos femmes parcourent des kilomètres pour chercher de l’eau douteuse, et nous regardons impuissants cette situation se dégrader jour après jour », témoigne un habitant anonyme, la voix chargée d’amertume. Comment une région aussi riche en ressources naturelles peut-elle en arriver à une telle crise hydrique ?
La réponse se trouve dans les cicatres encore fraîches du conflit qui a secoué la région. Les affrontements de mars et avril dernier entre les rebelles de l’AFC/M23 et les forces gouvernementales ont laissé derrière eux des infrastructures vitales en lambeaux. La tuyauterie qui acheminait l’eau du captage vers la cité a été littéralement pulvérisée par des bombardements, réduisant à néant l’investissement d’une organisation humanitaire qui avait installé des bornes fontaines il y a à peine un an.
Face à cette situation désespérée, la population n’a d’autre choix que de se tourner vers les rivières environnantes, dont l’eau impropre à la consommation représente une menace permanente pour la santé publique. « Chaque gorgée d’eau devient une roulette russe sanitaire », déplore une mère de famille, montrant l’eau boueuse qu’elle vient de puiser. Le spectre du choléra, de la typhoïde et autres maladies hydriques plane désormais sur Kibua et ses neuf quartiers.
Mwami Kitwana Ngulu Séraphin, chef du groupement Ihana, lance un cri d’alarme poignant devant l’incapacité du comité local de l’eau à faire face à ces dégâts d’infrastructure. « Nous avons besoin d’une intervention urgente des autorités et des organisations spécialisées dans le domaine WASH (Water, Sanitation and Hygiene) », plaide l’autorité coutumière. Son appel résonne comme une ultime tentative pour sauver ses administrés d’une catastrophe sanitaire annoncée.
La situation est d’autant plus dramatique que Kibua abrite plus de 5000 personnes, mélange fragile d’autochtones et de déplacés fuyant les atrocités des rebelles dans les localités voisines. Ces populations déjà traumatisées par la violence se retrouvent maintenant confrontées à une nouvelle épreuve : la lutte quotidienne pour l’accès à l’eau, cette ressource si fondamentale.
Que faut-il de plus pour que la communauté internationale et les autorités congolaises prennent la mesure de cette urgence humanitaire ? Combien de vies faudra-t-il sacrifier avant que des solutions durables ne soient mises en place ? Les habitants de Kibua, entre résignation et colère, attendent des réponses concrètes tandis que le temps joue contre leur santé et leur dignité.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd