La terre gronde au cœur du parc des Virunga. Ce mercredi 24 septembre, plus de 20 hectares de cultures vivrières ont été réduits en cendres par les éco-gardes de l’ICCN, déclenchant une colère noire parmi les cultivateurs de Mayangose. Une situation explosive qui paralyse la région de Beni et révèle une crise bien plus profonde : celle des limites floues d’un parc national devenu champ de bataille écologique et social.
Comment en est-on arrivé à cette confrontation directe entre protecteurs de la nature et populations riveraines ? Les éco-gardes justifient leur action par la violation des limites du parc, affirmant protéger ce sanctuaire classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Mais les cultivateurs, eux, brandissent un tout autre discours : leurs terres ancestrales seraient illégitimement annexées par le parc Virunga.
La route Nyaleke, artère vitale reliant Beni à Kasindi, est devenue le théâtre de cette révolte paysanne. Blocages, barricades, colère contenue : toute la journée, la circulation a été paralysée par des hommes et des femmes poussés à bout. « Nos champs représentent notre seule survie », lance un cultivateur sous couvert d’anonymat. « Détruire nos récoltes, c’est nous condamner à la famine ».
Le vice-gouverneur Jean-Louis Karawa ne cache pas son amertume face à cette « destruction méchante ». Son constat est sans appel : l’action des éco-gardes est « prématurée » alors qu’une commission travaille justement à clarifier les limites contestées du parc. Un processus de délimitation qui traîne depuis des mois, laissant les populations dans l’incertitude la plus totale.
Le conflit parc Virunga dépasse largement le simple différend foncier. Il symbolise la difficile conciliation entre conservation de la biodiversité et droits des communautés locales. Les éco-gardes, souvent perçus comme une force d’occupation, défendent pourtant un écosystème unique au monde. Mais à quel prix social ? La destruction des champs dans le Nord-Kivu risque de creuser encore le fossé de défiance entre l’ICCN et les populations.
La réunion d’urgence prévue ce jeudi 25 septembre représente un ultime espoir de désamorcer la crise. Toutes les parties prenantes devront trouver un terrain d’entente avant que la situation ne dégénère davantage. Le vice-gouverneur l’a promis : la sécurité des populations reste la priorité absolue. Mais comment concilier protection environnementale et sécurité alimentaire quand les terres cultivables se font rares ?
Cette crise des cultivateurs Mayangose pose une question fondamentale : jusqu’où peut-on sacrifier les besoins immédiats des populations pour préserver un patrimoine naturel ? Les éco-gardes ICCN font leur travail, mais les paysans défendent leur survie. La solution passe nécessairement par une délimitation parc Virunga claire et acceptée par tous. En attendant, les champs continuent de brûler, et avec eux, l’espoir d’une coexistence pacifique.
La forêt en détresse du Virunga devient le miroir des tensions qui déchirent l’est de la RDC. Entre pression démographique, pauvreté endémique et impératifs de conservation, le parc national vit une quadrature du cercle. La destruction des champs Nord-Kivu n’est que la partie émergée d’un iceberg de frustrations accumulées. Les autorités devront faire preuve de sagesse pour éviter que ce conflit ne s’étende à l’ensemble de la région.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net