Dans l’écrin feutré de l’Institut Français de Kinshasa, une vibration particulière anime les murs de la Gombe. L’exposition Kitala-Tala s’est installée comme une présence bienveillante et interrogatrice, offrant aux visiteurs bien plus qu’un simple parcours artistique : une expérience de confrontation avec soi-même. Jusqu’au 7 octobre 2025, cette manifestation culturelle majeure incarne la vitalité de l’art contemporain en RDC, portée par trois voix plastiques singulières.
Le vernissage de ce mercredi 24 septembre a révélé une scénographie où chaque œuvre fonctionne comme un écho, une réponse visuelle aux questionnements qui traversent la société congolaise contemporaine. Naomie Mboba, Luvie Luyeye et Teddy Lunsasu, réunis dans ce dialogue trialectique, transforment l’espace d’exposition en un laboratoire d’introspection collective. Leurs créations, fruits d’une résidence artistique approfondie au sein de l’ASBL LOSA, dépassent la simple dimension esthétique pour atteindre une profondeur philosophique rare.
Emmanuel Nzongo, commissaire de l’exposition, définit le projet avec une métaphore puissante : « Kitala-Tala signifie miroir en lingala. Chaque œuvre devient ici un reflet : pour l’artiste qui se découvre dans son processus créatif, pour le spectateur qui se reconnaît dans les formes et les couleurs, et pour la société qui y voit ses contradictions et ses espoirs. » Cette exposition à l’Institut Français de Kinshasa fonctionne ainsi comme une chambre d’échos où les préoccupations identitaires résonnent avec une acuité particulière.
Parmi les trois artistes plasticiens congolais, Naomie Mboba apporte une sensibilité unique, nourrie par l’écoute et l’échange. « Mon travail part du questionnement », confie-t-elle. « Je vais à la rencontre des gens, je collecte leurs paroles, leurs doutes, leurs certitudes. Mes œuvres deviennent alors des réponses plastiques à ces dialogues. » Son approche crée un pont entre l’intime et l’universel, entre la vulnérabilité individuelle et les défis collectifs d’une société en mutation.
Comment l’art peut-il nous aider à mieux comprendre notre place dans le monde ? Cette interrogation traverse l’ensemble du parcours, où les médiums se répondent et se complètent. Les installations de Luvie Luyeye jouent avec la matière et la lumière, tandis que les compositions de Teddy Lunsasu explorent les frontières entre figuration et abstraction. Ensemble, ils forment un trio complémentaire dont la diversité des expressions enrichit la réflexion proposée aux visiteurs.
L’exposition Kitala-Tala s’inscrit dans une dynamique plus large de valorisation de la création contemporaine en République Démocratique du Congo. Elle témoigne de la maturité d’une scène artistique qui ose aborder des thématiques complexes avec audace et subtilité. Les œuvres présentées ne cherchent pas à apporter des réponses définitives, mais plutôt à ouvrir des espaces de dialogue, à provoquer des rencontres entre les regards et les consciences.
Jusqu’au 7 octobre, cet événement culturel majeur à Kinshasa invite à une déambulation méditative. Les visiteurs sont conviés à une expérience immersive où le temps semble suspendu, où chaque détail artistique devient prétexte à la réflexion. Dans une société souvent bousculée par les urgences du quotidien, cette exposition miroir questionnement offre un rare moment de pause contemplative, une opportunité de se reconnecter avec les dimensions essentielles de l’existence.
La puissance évocatrice de ces créations dépasse le cadre strictement esthétique pour toucher à l’universel. À travers les prismes de l’identité, de la mémoire et de la projection dans l’avenir, les trois artistes plasticiens congolais proposent une lecture sensible des enjeux qui traversent la société contemporaine. Leur travail, à la fois personnel et collectif, fonctionne comme un catalyseur d’émotions et de pensées, invitant chacun à devenir acteur de sa propre réflexion.
Que reste-t-il de nous lorsque nous nous regardons dans le miroir de l’art ? Cette question, fondamentale, résonne longtemps après avoir quitté les salles d’exposition. Kitala-Tala réussit le pari délicat d’allier excellence plastique et profondeur conceptuelle, confirmant ainsi la place essentielle de l’art dans le paysage culturel congolais. Un rendez-vous incontournable pour tous ceux qui croient en la capacité de la création à éclairer notre rapport au monde.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Eventsrdc
