Après des mois de suspense politique, le président Félix Tshisekedi a finalement dévoilé la composition du gouvernement Suminwa II ce 8 août 2025. Cette annonce tant attendue marque un tournant dans la gouvernance congolaise, avec un exécutif resserré à moins de 50 membres contre 54 précédemment. Une rationalisation présentée comme gage d’efficacité, mais qui soulève immédiatement des questions sur sa capacité à répondre aux multiples crises que traverse la République Démocratique du Congo.
La Première ministre Judith Suminwa Tuluka hérite d’une équipe où se côtoient continuité et renouvellement. Le gouvernement Suminwa II se distingue par son ouverture politique, intégrant des figures de l’opposition et de la société civile. Cette composition du gouvernement RDC 2025 traduit-elle une réelle volonté d’apaisement ou simplement un calcul stratégique en vue des prochains scrutins?
Parmi les changements majeurs, la nomination d’Adolphe Muzito au Budget et de Floribert Anzuluni à l’Intégration régionale témoigne d’un souci d’élargir la base gouvernementale. Guillaume Ngefa, nouveau ministre de la Justice, succède à Constant Mutamba, contraint à la démission pour des affaires de détournement de fonds publics. Un remplacement qui intervient dans un contexte où l’exigence de transparence judiciaire n’a jamais été aussi pressante.
La fusion de plusieurs portefeuilles ministériels, comme les Infrastructures et l’Urbanisme confiés à Alexis Gisaro, illustre la volonté affichée de rationalisation. Mais cette compression administrative suffira-t-elle à endiguer la gabegie financière qui mine l’action publique depuis des décennies? Les ministres Congo devront faire leurs preuves dans un environnement économique des plus défavorables.
Le maintien de Patrick Muyaya à la Communication et Julien Paluku au Commerce extérieur suggère une certaine continuité dans la politique congolaise. Cependant, le départ d’Ève Bazaïba de l’Environnement au profit de Marie Niange Ndambo pourrait signaler un réajustement des priorités écologiques du gouvernement.
Dans le domaine sécuritaire, la reconduction de Guy Kabombo Muadiamvita à la Défense nationale indique que la stratégie militaire à l’Est du pays restera inchangée. Pourtant, la persistance de l’insécurité dans le Nord-Kivu face aux rebelles du M23 interroge sur l’efficacité de cette approche. La nouvelle équipe devra rapidement proposer des solutions tangibles pour protéger les populations civiles.
Sur le plan économique, le duo Daniel Mukoko Samba à l’Économie nationale et Doudou Fwamba Likunde aux Finances hérite d’une situation préoccupante : inflation galopante, dépréciation du franc congolais et chômage endémique. Leur capacité à redresser la barre déterminera largement la crédibilité du gouvernement Suminwa II auprès des Congolais.
La présence de Jean-Pierre Bemba Gombo aux Transports et Voies de communication souligne l’importance accordée au désenclavement du territoire. Un chantier prioritaire pour relancer l’économie nationale, mais qui nécessitera des investissements colossaux dans un contexte budgétaire contraint.
Judith Suminwa Tuluka dirige donc un gouvernement à la croisée des chemins. Son équipe devra simultanément gérer les urgences sécuritaires, relancer l’économie et répondre aux attentes sociales légitimes de la population. La marge de manœuvre apparaît étroite, tant les défis s’accumulent.
La réduction du nombre de ministres, si elle est saluée par certains comme un geste d’austérité, pourrait aussi révéler ses limites face à l’ampleur des missions confiées à chaque département. La fusion des portefeuilles risque-t-elle de diluer les responsabilités plutôt que d’améliorer l’efficacité? L’avenir le dira.
La composition du gouvernement Suminwa II reflète un équilibre subtil entre différentes sensibilités politiques. Mais cet éclectisme saura-t-il produire une cohésion suffisante pour mener les réformes nécessaires? La Première ministre devra imposer son leadership face à des personnalités souvent expérimentées et bien implantées dans le paysage politique congolais.
Alors que la RDC affronte une crise multidimensionnelle, ce nouveau gouvernement incarne autant d’espoirs que de doutes. Sa capacité à transformer les promesses en réalisations concrètes sera scrutée à la loupe par une population impatiente de voir son quotidien s’améliorer. Les premiers cent jours de l’équipe Suminwa II s’annoncent décisifs pour l’avenir politique du pays.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: linterview.cd