La tribune des Nations Unies a une fois encore servi de caisse de résonance aux préoccupations sécuritaires de la République Démocratique du Congo. Le Président Félix Tshisekedi, dans son intervention à la 80e Assemblée générale, a dépeint avec une gravité mesurée la situation dans l’Est du pays, qualifiant la crise de « génocide silencieux » après plus de trente années de violences. Une terminologie forte qui contraste avec l’immobilisme apparent de la communauté internationale face à cette tragédie humaine.
Le chef de l’État congolais n’a pas mâché ses mots pour désigner les responsables de cette crise sécuritaire persistante dans l’Est de la RDC. Pointant du doigt l’AFC/M23 et « ses parrains » – une référence à peine voilée aux Forces de défense du Rwanda – le président a martelé que « tous les marqueurs d’un projet d’extermination sont réunis ». Des accusations qui résonnent comme un constat d’échec des mécanismes de résolution des conflits régionaux.
Mais quelle crédibilité accorder aux dénonciations répétées sans actions concrètes ? Le discours de Tshisekedi à l’ONU intervient dans un contexte particulier où l’accord de paix signé le 27 juin dernier sous médiation américaine montre déjà ses limites. Comme le relève certains observateurs, cet accord RDC-Rwanda n’a pas empêché la poursuite des combats, créant un décalage inquiétant entre les déclarations diplomatiques et la réalité sur le terrain.
La reconnaissance par le président lui-même de l’inefficacité relative de cet accord dévoile une stratégie plus subtile : celle de réaffirmer l’engagement de Kinshasa dans les partenariats internationaux tout en pointant du doigt les responsabilités externes. Une posture qui permet de maintenir la pression sur Kigali tout en sécurisant un soutien international dont la RDC a cruellement besoin.
L’annonce de la participation congolaise au Conseil de sécurité de l’ONU pour la période 2026-2027 représente un autre volet de cette offensive diplomatique. Le pays entend y jouer un « rôle actif et responsable », articulé autour des priorités « paix et sécurité » ainsi que « prévention et résolution des conflits ». Une position qui pourrait donner à la RDC une tribune supplémentaire pour porter son plaidoyer sur la crise sécuritaire qui mine sa stabilité.
Le soutien apparent du président français Emmanuel Macron, qui a appelé la communauté internationale à « donner de l’espoir aux populations des Kivu », ajoute une dimension supplémentaire à ce tableau diplomatique complexe. Mais derrière les déclarations de solidarité se cachent-elles une réelle volonté d’action ? La rencontre entre Tshisekedi et le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, tout comme les échanges avec le conseiller américain Massad Boulos, semblent indiquer une intensification des efforts diplomatiques.
La RDC mise visiblement sur une approche multidimensionnelle pour résoudre la crise sécuritaire dans l’Est : dénonciation internationale, partenariats stratégiques et participation active aux instances décisionnelles. Mais cette stratégie suffira-t-elle à mettre un terme à ce que le président qualifie de génocide silencieux ? La communauté internationale, souvent prompte à condamner mais lente à agir, sera-t-elle enfin forcée de passer des mots aux actes ?
Alors que le Conseil de sécurité de l’ONu continue de débattre de la situation en RDC, les populations de l’Est attendent des solutions concrètes plutôt que des déclarations. La participation congolaise au Conseil de sécurité représente une opportunité unique de porter une voix africaine sur les questions de paix et de sécurité internationales. Mais cette position n’aura de valeur que si elle se traduit par des actions tangibles sur le terrain.
Le défi pour la diplomatie congolaise sera de transformer cette visibilité internationale en gains concrets pour la stabilisation de l’Est. Entre les promesses d’investissements américains et les engagements internationaux, la route vers la paix semble encore longue. La véritable question reste : la communauté internationale est-elle enfin prête à regarder en face la tragédie qui se déroule dans l’Est de la RDC, ou continuera-t-elle à assister, impassible, à ce génocide silencieux ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net