Malgré la déclaration officielle de l’épidémie d’Ebola le 5 septembre dernier dans la zone de santé de Bulape, province du Kasaï, un phénomène inquiétant persiste : les populations de 14 localités concernées ne semblent pas percevoir la gravité de la situation. Comment expliquer cette méfiance face aux consignes sanitaires alors que la maladie a déjà causé au moins 16 décès ?
Sur le terrain, les témoignages sont alarmants. Les gestes barrières, pourtant essentiels pour contenir la propagation du virus, sont largement ignorés. Poignées de main échangées sans précaution, regroupements sans distanciation sociale, transports en commun surchargés… Les habitudes sociales persistent, créant un terrain favorable à la transmission du virus Ebola.
Les taxis-motos, moyens de transport privilégiés dans la région, deviennent malgré eux des vecteurs potentiels de contamination. Un conducteur interrogé sur la voie publique témoigne : « C’est la faute de nos clients qui viennent à 4. C’est un danger pour eux ». Cette situation illustre le décalage entre la perception du risque et les réalités épidémiologiques.
Le Dr Jean-Pierre Sumba, chargé de la lutte contre la maladie au sein de la Division provinciale de la santé au Kasaï-Oriental, alerte sur les modes de transmission : « Cette maladie se transmet par contact avec une personne malade ou même avec des animaux malades. Il ne faut pas toucher les personnes présentant les signes de la maladie, ni leurs vêtements, ni leurs dépouilles ».
Face à cette résistance aux mesures préventives, les autorités sanitaires multiplient les messages de sensibilisation. Le lavage régulier des mains avec du savon ou des solutions hydroalcooliques reste la mesure la plus efficace pour réduire les risques de contamination. Mais comment convaincre une population habituée à vivre en communauté d’adopter soudainement des comportements individuels protecteurs ?
La complexité de la réponse à l’épidémie Ebola au Kasaï réside dans cet équilibre délicat entre respect des traditions locales et nécessité de protection sanitaire. Les équipes médicales doivent composer avec des réalités socioculturelles profondément ancrées tout en faisant face à une urgence de santé publique.
Des lueurs d’espoir persistent cependant. Le gouvernement a récemment lancé une campagne de vaccination pour protéger la population, et deux malades pris en charge au centre de traitement de Bulape ont été déclarés guéris, pouvant ainsi rejoindre leurs familles. Ces succès thérapeutiques démontrent l’efficacité de la prise en charge médicale lorsque les patients accèdent aux structures de soins à temps.
La situation dans la zone de santé de Bulape, territoire de Mweka, reste préoccupante mais contrôlable. L’enjeu majeur consiste désormais à renforcer l’adhésion communautaire aux mesures de prévention, condition sine qua non pour briser la chaine de transmission du virus Ebola. La mobilisation de tous les acteurs – autorités sanitaires, leaders communautaires et populations – reste essentielle pour venir à bout de cette épidémie.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
