La rébellion de l’Alliance Fleuve Congo (AFC-M23) a organisé ce dimanche 14 septembre un test d’évaluation pour 540 candidats magistrats à Goma, dans le cadre d’un processus controversé de recrutement judiciaire. Cette initiative, pilotée par la Commission de Relance de la Justice (CRJ), survient dans un contexte de tension extrême entre les autorités rebelles et le gouvernement central de Kinshasa.
Sur les 1 002 dossiers initialement déposés, les candidats retenus représentent diverses professions du secteur judiciaire : magistrats de carrière, greffiers, secrétaires de parquet, agents et officiers de police judiciaire, ainsi que des personnels des services notariaux et pénitentiaires. Delion Kimbulungu Mutangala, président de la CRJ, défend cette démarche comme nécessaire pour garantir la neutralité du système judiciaire dans les zones sous contrôle rebelle.
Les candidats retenus devront suivre une formation technique rigoureuse axée sur les valeurs déontologiques et éthiques, préalable à l’établissement de juridictions complètes incluant Tribunaux de grande instance et parquets. Cette restructuration judiciaire vise officiellement à combattre les violations constitutionnelles, la corruption, le tribalisme et les crimes d’État qui mineraient la région.
Cependant, cette initiative se heurte à une opposition ferme des autorités congolaises légitimes. Guillaume Ngefa Atondoko, Ministre d’État de la Justice et Garde des Sceaux, a annoncé lors de la 60e session du Conseil des droits de l’homme à Genève que tous les actes judiciaires émanant de l’AFC/M23 seraient annulés. Le gouvernement considère cette démarche comme illégitime et s’inscrivant dans une logique d’occupation étrangère.
Le ministre a qualifié les opérations de l’AFC/M23, soutenue selon Kinshasa par le Rwanda, de relevant du « nettoyage ethnique ». Il a réaffirmé la détermination du gouvernement à juger les crimes perpétrés dans les zones occupées et à rétablir l’autorité de l’État congolais. Une ordonnance portant annulation systématique de toutes décisions judiciaires rebelles a d’ores et déjà été signée.
Cette confrontation ouvre un front judiciaire parallèle au conflit armé, posant des questions cruciales sur l’administration de la justice dans l’Est de la RDC. Comment garantir les droits des populations civiles prises entre deux systèmes judiciaires antagonistes ? Quelle sera la validité future des décisions rendues par ces juridictions rebelles ?
La communauté internationale observe avec inquiétude cette judiciarisation du conflit, qui risque de compliquer davantage le processus de paix déjà fragile. Les prochains jours verront le déploiement annoncé de juridictions militaires par la rébellion, promettant d’intensifier cette bataille pour le contrôle de l’appareil judiciaire régional.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd