La Première ministre Judith Suminwa a procédé à une relance spectaculaire du processus de décentralisation en République Démocratique du Congo, en présidant ce lundi la première réunion du Comité Interministériel de Pilotage après cinq années de léthargie administrative. Cette initiative, saluée par les experts de la gouvernance locale, intervient dans un contexte où les provinces peinent à exercer pleinement leurs compétences constitutionnelles.
Popaul Kizungu Chihisa, Coordonnateur national de la Cellule Technique d’Appui à la Décentralisation, n’a pas caché son soulagement : « Madame la Première Ministre a pris l’initiative salvatrice de relancer ces réunions indispensables ». Le constat est sans appel : cinq années sans coordination interministérielle ont considérablement fragilisé l’édifice décentralisateur, pourtant pierre angulaire de la réforme de l’État congolais.
La question des finances provinciales s’est imposée comme le nœud gordien des discussions. Le ministre des Finances a présenté la réalité chiffrée d’une implémentation difficile de la rétrocession des 40% aux provinces. Dans un langage technocratique mesuré, il a souligné la nécessité d’« ajustements, y compris sur le plan constitutionnel » – une formulation qui en dit long sur les obstacles structurels rencontrés.
La Caisse nationale de péréquation, mécanisme constitutionnel destiné à corriger les déséquilibres territoriaux, se trouve au cœur des préoccupations. Son fonctionnement reste entravé par l’insuffisance des ressources et l’absence de cadre juridique adapté. Comment concilier ce dispositif permanent avec les programmes ponctuels comme le PDL-145T ? La question mérite d’être posée alors que les territoires attendent des solutions concrètes.
Judith Suminwa a manié à la fois le bâton et la carotte en instruisant les ministres sectoriels de s’impliquer activement pour surmonter les obstacles. La Première ministre joue gros sur ce dossier : un échec pourrait fragiliser durablement sa crédibilité réformatrice, tandis qu’une réussite consacrerait son leadership au sein de l’exécutif.
La prochaine réunion prévue en novembre 2025 s’annonce décisive. Elle devra transformer les déclarations d’intention en mesures opérationnelles, particulièrement sur le volet épineux des finances locales. Le gouvernement parviendra-t-il à concilier les impératifs budgétaires nationaux avec les légitimes aspirations financières des provinces ?
Cette relance du processus de décentralisation en RDC interroge fondamentalement la capacité de l’État à réformer sa gouvernance territoriale. Entre volontarisme affiché et contraintes réalistes, Judith Suminwa devra naviguer avec pragmatisme pour éviter que cette nouvelle impulsion ne se heurte aux écueils habituels de l’administration congolaise.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: primature.grouv.cd