Dans les territoires de Masisi, Nyiragongo et Rutshuru au Nord-Kivu, une crise silencieuse frappe le système éducatif. Comment expliquer que des enseignants consacrent leur vie à former les futures générations sans recevoir leur juste salaire depuis des mois ? Cette situation intenable soulève des questions fondamentales sur la priorité accordée à l’éducation dans les zones en conflit.
Les parlementaires du Nord-Kivu viennent de tirer la sonnette d’alarme : IFOD et Caritas Goma, partenaires du gouvernement pour la gestion des paies, semblent incapables d’assurer le versement régulier des salaires enseignants. Pourtant, selon les investigations des élus, le gouvernement libère bel et bien les fonds au même rythme que pour les autres provinces. Alors où se situe le véritable problème ?
La présence des groupes rebelles M23/RDF dans la région complique considérablement la logistique des paiements. IFOD et Caritas ont opté pour des transferts électroniques via des opérateurs mobiles comme Airtel et Orange. Une solution pragmatique en théorie, mais qui montre ses limites dans la pratique. Depuis janvier 2025, les versements s’effectuent « au compte-gouttes », selon l’expression du sénateur Janvier Mwisha Kasiwa.
Les conséquences sont dramatiques : certains enseignants ont reçu leur salaire jusqu’en avril, tandis que d’autres n’ont jamais perçu la moindre rémunération. Cette disparité de traitement crée un climat d’injustice et de frustration compréhensible. Comment maintenir la motivation et l’engagement pédagogique dans de telles conditions ? Les enseignants et leurs familles plongent progressivement dans la misère, affectant directement la qualité de l’enseignement dispensé.
Face à cette impasse, IFOD et Caritas Goma se renvoient mutuellement la responsabilité des retards. Ce jeu de ping-pong administratif est inacceptable quand l’avenir de milliers d’élèves est en jeu. Les parlementaires exigent désormais une intervention urgente de la ministre d’État en charge de l’Éducation et du ministre des Finances. L’objectif est clair : régulariser tous les arriérés avant la prochaine rentrée scolaire.
La menace de grève plane désormais sur le secteur éducatif du Nord-Kivu. Les enseignants, épuisés par des mois d’incertitude financière, pourraient décider de suspendre leurs activités. Une perspective alarmante pour une région déjà fragilisée par les conflits armés. L’éducation représente pourtant un pilier essentiel de la reconstruction et de la stabilité future.
Les parlementaires envisagent sérieusement de proposer un nouveau partenariat si la situation ne s’améliore pas rapidement. Cette crise met en lumière les défis spécifiques de la gestion éducative dans les zones de conflit. La solution devra nécessairement prendre en compte les contraintes sécuritaires tout en garantissant un mécanisme de paiement fiable et transparent.
Le Nord-Kivu peut-il se permettre de sacrisser son système éducatif sur l’autel des difficultés logistiques ? La réponse est évidemment non. L’éducation dans les territoires en conflit nécessite une attention particulière et des solutions adaptées. La prochaine rentrée scolaire constituera un test crucial pour l’engagement réel des autorités en faveur du droit à l’éducation pour tous les enfants congolais.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net