À Mbandaka, le compte à rebours vers une rentrée scolaire paralysée a commencé. Les enseignants des écoles publiques, exaspérés par des années de promesses non tenues, ont brandi l’ultime recours : la grève générale à partir du 1er septembre. Une décision lourde de conséquences pour des milliers d’élèves de la province de l’Équateur.
« Nous n’avons plus le choix. Comment voulez-vous qu’un enseignant motivé travaille avec un salaire de misère, souvent payé avec des mois de retard ? » interroge Français Mukadi Kashama, président de l’intersyndicale. Sa voix porte la colère sourde de centaines de professeurs réunis en assemblée générale ce lundi. Leur patience a atteint ses limites après l’expiration du préavis de grève déposé depuis le 4 août dernier.
Les revendications sont claires et tangibles : mécanisation effective des enseignants, attribution de numéros matricules, augmentation salariale à 517 dollars mensuels, et surtout, la suppression pure et simple de la DINACOPE. Cette direction nationale de contrôle et de la paie est perçue comme un maillon bureaucratique superflu, source de retards et de complications innombrables dans le traitement des salaires.
Derrière ces exigences techniques se cache une réalité humaine brutale. Imaginez un instituteur devant nourrir sa famille avec moins de 100 dollars par mois, dans une ville où le coût de la vie ne cesse d’augmenter. Comment maintenir sa dignité professionnelle quand on doit mendier des avances sur salaire ou contracter des dettes pour survivre ?
La situation à Mbandaka n’est malheureusement pas isolée. Elle s’inscrit dans une crise plus large du système éducatif congolais, où les enseignants sont souvent les grands oubliés des politiques publiques. Le gouvernement central semble minimiser l’impact potentiel de ce mouvement, alors que les syndicats préviennent : la grève pourrait s’étendre comme une traînée de poudre à d’autres provinces si aucune réponse concrète n’intervient rapidement.
Les principaux syndicats – Syeco, Synecat, Synep et Cosel – ont mis de côté leurs divergences pour former un front commun. Cette unité inédite démontre la gravité de la situation et la détermination des enseignants à se faire entendre. « Nous ne sommes pas des machines à enseigner. Nous méritons un traitement décent pour accomplir notre mission éducative », martèle un représentant syndical.
À une semaine de la rentrée scolaire, l’incertitude plane sur les salles de classe de Mbandaka. Des milliers de familles se demandent si leurs enfants pourront reprendre le chemin de l’école normalement. Les autorités provinciales et nationales sont désormais sous pression : trouver un compromis acceptable ou assumer la responsabilité d’une année scolaire compromise.
Cette crise soulève des questions fondamentales sur la valeur que la société congolaise accorde à l’éducation. Peut-on construire un avenir meilleur sans investir dans celles et ceux qui forment les générations futures ? La réponse des enseignants de l’Équateur est claire : assez de discours, place aux actes.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd