Au cœur de Mbuji-Mayi, une pratique alarmante met en danger la santé publique de toute une communauté. Chaque soir, le long de l’avenue Kalonji, des adolescents transforment le trottoir en officine sauvage où s’étalent médicaments et poussière dans une indifférence troublante. Comment en est-on arrivé à cette vente illicite de médicaments à ciel ouvert, au mépris total des règles sanitaires les plus élémentaires ?
Le marché Bakuadianga, dans la commune de Dibindi, devient le théâtre d’un commerce informel qui défie toute logique médicale. Plus d’une dizaine de tables improvisées accueillent des produits pharmaceutiques exposés aux intempéries, à la pollution et aux regards indiscrets. Impossible de vérifier l’état de ces médicaments, leurs dates de péremption ou même leur provenance réelle. Pourtant, la clientèle semble au rendez-vous, indifférente aux risques encourus.
« C’est une stratégie pour attraper les clients qui sortent du marché », explique l’un de ces jeunes vendeurs, comme si la santé pouvait se négocier au même titre que des légumes ou des vêtements. Le pire ? Certains consommateurs avouent « nettoyer » les plaquettes poussiéreuses à domicile, ignorant que la contamination dépasse largement la simple saleté visible.
Raphaël Nkongolo, résident local, exprime une indignation partagée par beaucoup : « Je ne peux pas accepter d’acheter un produit qu’on vend sur la table. Quel degré de saleté, de poussières sur ces produits ! » Son cri du cœur résume l’absurdité d’une situation où la santé devient une marchandise comme une autre.
Le paradoxe est saisissant : à quelques mètres de cette pharmacie informelle du Kasaï-Oriental, des dépôts pharmaceutiques légaux continuent leurs activités, créant un contraste dangereux entre professionnalisme et amateurisme criminel. Un pharmacien établi dénonce le laxisme des inspecteurs sanitaires qui passent « à l’aveuglette » sans sanctionner ces pratiques.
Jhu Ikela, pharmacien inspecteur provincial intérimaire, promet une campagne de sensibilisation imminente sur la loi pharmaceutique. Son avertissement est sans équivoque : « Les médicaments sont des poisons. On ne peut pas les consommer comme du manioc. » Une analogie frappante qui souligne l’urgence d’agir contre ces médicaments contrefaits au Congo.
Mais au-delà des beaux discours, que faire concrètement ? La solution passe par un renforcement des contrôles sanitaires, une éducation populaire sur les dangers de l’automédication sauvage, et surtout, une prise de conscience collective. Chaque comprimé acheté sur ces tables de fortune représente un risque vital : intoxication, résistance aux antibiotiques, ou pire, décès évitable.
La santé publique en RDC mérite mieux que ce marché de l’angoisse. Il est temps que les autorités, les professionnels de santé et les citoyens unissent leurs efforts pour assainir le marché Bakuadianga et protéger les populations des dangers insidieux des médicaments vendus dans la rue. La vie n’a pas de prix, mais elle exige parfois de payer le prix de la vigilance.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net