Dans le groupement de Munigi, au cœur du territoire de Nyiragongo, un vent d’espoir souffle enfin sur des vies brisées par des années de violence. Plus de 200 jeunes, meurtris par les conflits armés qui ensanglantent le Nord-Kivu, viennent de retrouver une lueur d’avenir grâce à un projet novateur de réinsertion socio-économique. Comment redonner un avenir à une génération sacrifiée sur l’autel des guerres fratricides ?
Parmi eux se trouvent d’anciens enfants associés aux forces et groupes armés, ces âmes trop tôt volées à l’insouciance de l’enfance, ainsi que des jeunes vulnérables vivant dans une précarité extrême. La particularité de cette initiative ? Près de 100 filles, souvent doublement victimes des violences, font partie des bénéficiaires. Leur parcours témoigne de la résilience incroyable d’une jeunesse qui refuse de sombrer dans le désespoir.
Financé par la MONUSCO à hauteur de 96 000 dollars américains, ce projet ambitieux s’intitule « Activités génératrices de revenus, formation professionnelle et scolarisation à Munigi ». Un programme complet qui va bien au-delà de l’assistance ponctuelle, visant plutôt à recréer les fondements d’une économie locale durable. Clément Bavukahe Ntaboba, coordonnateur de l’ONG PAMI chargée de l’exécution, ne cache pas sa satisfaction devant les premiers résultats concrets.
« Le moulin communautaire inauguré ce mardi 19 août au village de Buhima symbolise parfaitement cette nouvelle dynamique », explique-t-il. Cet équipement, bien plus qu’une simple infrastructure, représente un outil d’autonomisation pour toute la communauté. Les femmes pourront moudre leurs grains sans parcourir des kilomètres, les agriculteurs verront leurs revenus augmenter, et les jeunes formés assureront la maintenance de la machine.
Mais le projet ne s’arrête pas là. Formation en menuiserie, couture, agriculture moderne, mécanique automobile et même en informatique : les compétences transmises sont variées et adaptées aux réalités du marché local. Pourquoi ces métiers précisément ? Parce qu’ils répondent aux besoins immédiats d’une région en reconstruction, où chaque compétence nouvelle contribue à retisser le tissu social déchiré.
La mise en œuvre n’a pourtant pas été simple. Initialement prévu pour six mois à partir de juillet 2024, le programme a dû être prolongé en raison des défis sécuritaires persistants dans la zone. Les équipes sur place ont dû composer avec les caprices d’un terrain miné par les tensions communautaires et la présence de groupes armés. Cette réalité rappelle cruellement que la réinsertion des jeunes affectés par les conflits armés en RDC se joue sur un fil, entre espoir de paix et menace permanente de rechute.
Les formations professionnelles dispensées à Nyiragongo représentent bien plus qu’un apprentissage technique. Elles offrent une alternative concrète à l’enrôlement forcé, une porte de sortie vers une vie digne. Comment convaincre un adolescent que l’atelier vaut mieux que le kalachnikov ? En lui montrant que le travail honnête peut nourrir sa famille et lui redonner sa place dans la communauté.
Le projet de réduction des violences communautaires à Munigi démontre une vérité essentielle : la paix ne se décrète pas, elle se construit jour après jour through des actions concrètes. En s’attaquant aux racines économiques et sociales des conflits, en offrant des perspectives tangibles à une jeunesse désœuvrée, on tarit le reservoir de recrutement des groupes armés.
Reste la question fondamentale : ces initiatives ponctuelles suffiront-elles à enrayer le cycle infernal de la violence au Nord-Kivu ? Si les résultats à Munigi sont encourageants, l’ampleur des besoins dépasse largement les moyens actuels. La réinsertion des ex-enfants soldats demande un accompagnement sur le long terme, bien au-delà de la formation initiale.
Le défi maintenant consiste à pérenniser ces acquis, à multiplier ces projets sur l’ensemble du territoire, et surtout à garantir que ces jeunes ne retombent pas dans l’engrenage de la violence. Leur avenir, et celui de toute la région, en dépendent.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net