Alors que la stagnation dans l’application de la déclaration de principes signée entre le gouvernement congolais et l’AFC/M23 suscite de vives inquiétudes, l’ambassadrice américaine Lucy Tamlyn a adopté un ton à la fois optimiste et ferme lors d’une déclaration à Kinshasa. La diplomate a reconnu les « glissements » dans le calendrier des négociations paix RDC tout en insistant sur la nécessité d’une action concrète immédiate.
« Je vous encourage vraiment à voir les pas franchis depuis Washington », a déclaré Tamlyn ce vendredi 15 août 2025, évoquant le rôle central du Qatar dans le processus. Cette double diplomatie USA-Qatar constitue désormais l’épine dorsale des efforts internationaux pour résoudre le conflit Est Congo. Mais derrière cet optimisme affiché perce une urgence : les engagements pris à Doha le 19 juillet tardent à se matérialiser sur le terrain.
La représentante américaine n’a pas occulté les difficultés, soulignant que « la construction de la paix dans un conflit qui dure depuis des décennies n’est jamais facile ». Son analyse pointe vers une vérité dérangeante : l’accord Doha M23 reste lettre morte sans mécanisme de suivi. D’où son plaidoyer pour l’activation rapide du comité suivi sécurité, prévu dans l’accord de Washington du 27 juin. Ce comité aurait pour mission cruciale de « contrôler les actions », notamment concernant le cessez-le-feu et le désengagement face aux FDLR.
Comment expliquer ce décalage entre signatures solennelles et inertie sur le terrain ? Tamlyn esquisse une réponse en appelant à une pression régionale accrue : « Nous utilisons tous nos leviers diplomatiques et demandons aux pays de la région de nous joindre ». Cet appel intervient alors que le calendrier initial prévoyait des négociations finales dès le 8 août et une signature d’accord global ce 17 août – échéances désormais fantômes.
Dans un écho troublant à ces préoccupations, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme Volker Türk a lancé mercredi dernier un appel depuis Genève pour la protection des civils. Ses mots résonnent comme un constat d’échec provisoire : les principes signés ne protègent pas les populations des Kivus. Les violences persistent, alimentant une crise humanitaire où les États-Unis restent le premier bailleur, sans pourtant enrayer la spirale infernale.
La question qui brûle les lèvres des observateurs est simple : les beaux discours diplomatiques peuvent-ils survivre à l’épreuve du terrain ? Les communautés de l’Est, prises en étau entre les groupes armés et les retards politiques, vivent dans « une profonde incertitude » selon les propres termes du rapport. Le mécanisme de suivi tant réclamé par Washington pourrait-il être la clé de voûte manquante ? Rien n’est moins sûr, alors que les causes profondes du conflit – ressources, rivalités ethniques, ingérence régionale – attendent toujours d’être adressées.
Dans ce paysage complexe, l’engagement américano-qatari apparaît comme le dernier rempart contre l’effondrement total du processus. Mais comme le souligne Tamlyn avec réalisme, l’heure n’est plus aux déclarations d’intention : « Il va falloir des discussions très profondes sur les causes du conflit ». Un avertissement qui sonne comme un ultimatum voilé aux signataires des accords.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd