Alors que les dirigeants de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) se réunissaient à Antananarivo autour des enjeux économiques, la voix de la République démocratique du Congo a résonné avec une urgence sécuritaire incontournable. Le vice-Premier ministre Guy Kabombo Muadiavita, représentant personnel du président Félix Tshisekedi, a détourné l’agenda du 45ᵉ sommet pour placer sous les projecteurs la poudrière de l’Est congolais. Un rappel brutal que sans stabilité régionale, toute vision de développement reste lettre morte.
Le thème officiel – « Promouvoir l’industrialisation, la transformation du système agricole et la transition énergétique » – semblait presque surréaliste face au tableau brossé par le ministre congolais. Kabombo Muadiavita n’a pas mâché ses mots : malgré les multiples initiatives de paix, dont les processus de Luanda et Nairobi, la situation ne cesse de se dégrader. « Le M23/AFC, soutenu par le Rwanda, multiplie les violations et consolide ses positions sur des territoires occupés illégalement », a-t-il déclaré, jetant une ombre sur les promesses réitérées de désescalade.
La stratégie affichée par Kinshasa interroge : privilégier la voie du dialogue face à ce qu’il qualifie d’« agression persistante » relève-t-il de la sagesse politique ou d’une dangereuse passivité ? Le ministre a défendu cette orientation comme un choix délibéré pour « éviter un lourd bilan en vies humaines ». Pourtant, cet appel à la modération contraste singulièrement avec l’accusation directe portée contre Kigali, mettant à nu les fractures persistantes au sein de la SADC. L’absence de réaction immédiate des autres chefs d’État soulève d’ailleurs une question cruciale : la solidarité régionale n’est-elle qu’un vœu pieux face aux réalités géopolitiques ?
Dans un plaidoyer chargé de sous-textes diplomatiques, Kabombo Muadiavita a imploré une « action collective et solidaire » pour restaurer la paix. Un discours qui résonne comme un test pour la nouvelle présidence tournante de la SADC, désormais assumée par Madagascar jusqu’en août 2026. Le président malgache Andry Rajoelina hérite ainsi d’un dossier explosif où les impératifs économiques affichés par l’organisation devront composer avec l’urgence sécuritaire congolaise.
La passation de pouvoir entre le Zimbabwe et Madagascar s’est effectuée dans le décorum protocolaire, mais le véritable enjeu réside désormais dans la capacité de la SADC à transcender ses divisions. Alors que la RDC mise sur une résolution concertée des crises, l’efficacité des mécanismes régionaux semble plus que jamais suspendue à un équilibre précaire entre dénonciations et actions concrètes. Le prochain sommet devra trancher : la résilience promise inclura-t-elle enfin la sécurité de l’Est congolais, ou restera-t-elle un concept économique détaché des réalités sanglantes du terrain ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net