La forêt équatoriale de la Tshopo, poumon vert en détresse, vient d’obtenir un répit inédit. Le gouverneur intérimaire Didier Lomoyo Iteku a signé à Kisangani un arrêté historique : une fermeture chasse Tshopo totale du 1er août au 30 novembre 2025. Quatre mois cruciaux où toute activité cynégétique sera suspendue pour tenter d’enrayer l’hémorragie de biodiversité qui frappe cette province.
Cette décision n’est pas un simple coup d’épée dans l’eau. Elle répond à une urgence écologique criante : les espèces emblématiques du bassin congolais, des okapis aux pangolins en passant par les singes endémiques, sont asphyxiées par une double menace. Le braconnage industriel ronge les populations animales, tandis que la surexploitation locale transforme des écosystèmes millénaires en déserts silencieux. Comment en sommes-nous arrivés là ? La réponse tient en un mot : profit. Un trafic de viande de brousse qui alimente des réseaux urbains sans scrupules.
L’arrêté chasse 2025 trace une ligne rouge infranchissable. Pendant cette trêve, il sera strictement interdit de chasser tout gibier, qu’il soit à poil ou à plume. La commercialisation de viande sauvage – fraîche, salée ou boucanée – devient un délit. Même le transport d’armes à feu, de cartouches ou de câbles-pièges sera prohibé sur l’ensemble du territoire provincial. Une mesure radicale ? Peut-être, mais nécessaire face à l’ampleur du désastre.
Seule lueur d’adaptation culturelle : les pratiques traditionnelles des communautés autochtones Pygmées bénéficient d’une exemption stricte. Encore faut-il qu’elles respectent les usages ancestraux, sans dérive commerciale. Cette nuance témoigne d’un équilibre fragile entre protection faune Tshopo et droits des premiers habitants de la forêt.
Gare aux contrevenants ! La province brandit l’article 85 de la loi de 1982 sur la chasse, prévoyant des sanctions implacables contre braconniers, trafiquants et complices. Des peines pouvant aller jusqu’à des années de prison, dans un pays où l’impunité environnementale a trop longtemps régné. Cette fermeté est-elle le signal d’un réveil des autorités face au braconnage espèces menacées ? La réponse se mesurera sur le terrain.
Derrière cette décision se cache un enjeu vital : la régénération. Quatre mois sans pression humaine permettent aux populations animales de se reproduire, aux jeunes de grandir, aux équilibres prédateurs-proies de se reconstituer. Une respiration salvatrice pour une nature au bord de l’épuisement. Alors que la RDC abrite 60% des forêts du bassin du Congo, cette interdiction chasse RDC localisée pourrait inspirer d’autres provinces.
Reste la question cruciale : cette trêve suffira-t-elle à inverser la tendance ? Sans un contrôle renforcé des parcs et une alternative économique pour les communautés dépendantes de la chasse, le risque de reprise intensive post-moratoire est réel. La Tshopo ouvre une brèche dans le mur du fatalisme écologique. À nous de l’élargir avant que la dernière antilope ne disparaisse dans le vacarme des armes.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net