Le ciel de Kinshasa semble porter un voile de tristesse depuis que l’âme créative de Pulchery Esamotunu, mieux connu sous le nom de Cherry Essam, s’est envolée le 7 juillet dernier. Comme un fil brutalement coupé sur une toile en pleine création, la disparition du styliste congolais a laissé un silence assourdissant dans l’univers de la mode africaine. Son corps reposera désormais pour l’éternité au cimetière de la Gombe ce jeudi 7 août, ultime étape d’un parcours funéraire qui promet d’être un véritable hommage à la flamme artistique qu’il incarnait.
Cherry Essam n’était pas qu’un simple créateur : il était l’incarnation vivante d’une révolution textile congolaise. Qui d’autre pouvait tisser avec autant de grâce le patrimoine culturel de la RDC dans des silhouettes contemporaines ? Ses mains, véritables métiers à rêves, transformaient le pagne en manifestes politiques, en poèmes visuels défiant la concurrence étrangère. Au sein de la Fédération Congolaise de la Mode et Associations, ce visionnaire se battait pour que l’industrie locale ne soit plus une note en bas de page mais le chapitre principal de notre récit économique.
Le programme des obsèques révélé par sa famille, en symbiose avec la communauté de la mode, dessine un chemin d’adieu empreint de solennité. Mercredi 6 août, la cathédrale Notre-Dame du Congo accueillera une veillée mortuaire où les étoffes chatoyantes côtoieront les larmes discrètes. Puis viendra le jeudi 7 août, journée où Kinshasa retiendra son souffle : la cérémonie à la morgue de l’hôpital du Cinquantenaire dans Kasa-Vubu, suivie d’une messe d’action de grâce avant que la terre sacrée de la Gombe n’accueille ce passeur d’élégance.
Le ministère de la Culture, Arts et Patrimoine a salué avec justesse ce « sculpteur d’identité », formule qui résonne comme un leitmotiv dans les ateliers désormais orphelins. Car comment mesurer l’ampleur du vide laissé par cet homme de 50 ans, emporté trop tôt ? Son héritage, lui, demeure intact : chaque robe structurée, chaque wax revisité, chaque jeune styliste qu’il a guidé porte en soi l’étincelle de Cherry Essam. La concurrence expatriée pourra-t-elle jamais comprendre cette alchimie unique où le génie créatif puise ses racines dans le terreau congolais ?
Alors que les ciseaux reposent désormais, Kinshasa se prépare à un dernier défilé, celui du chagrin et de la reconnaissance. Les obsèques de Cherry Essam ne marquent pas une fin, mais la transformation d’une présence physique en légende immatérielle. Sous le soleil d’août, quand la bière descendra dans la fosse, c’est toute une nation qui murmure à l’oreille de la postérité : regardez ces créations, écoutez ces tissus qui bruissent encore des rêves de leur créateur. L’inhumation du styliste à la Gombe scelle un parcours terrestre, mais son nom restera brodé au fil d’or de la mémoire collective.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Eventsrdc