Dans un geste diplomatique ferme, la ministre congolaise des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba, a convoqué ce jeudi 17 juillet l’ambassadeur de l’Ouganda en RDC. Cette démarche fait suite à la réouverture surprise des postes frontaliers de Bunagana et Ishasa par les autorités ougandaises, intervenue sans la moindre concertation préalable avec Kinshasa. Le communiqué officiel publié sur X par le ministère précise que cette action unilatérale viole clairement les protocoles frontaliers établis.
La réouverture de Bunagana, située entre le district ougandais de Kisoro et le territoire congolais de Rutshuru au Nord-Kivu, soulève des questions brûlantes sur la souveraineté de la RDC. Comment comprendre cette initiative de Kampala alors que la zone demeure sous contrôle du mouvement rebelle AFC/M23 depuis son occupation en juin 2022 ? La ministre Kayikwamba a réaffirmé avec vigueur l’attachement inébranlable du gouvernement congolais au respect de son intégrité territoriale, rappelant que toute décision affectant les frontières nationales requiert un accord bilatéral.
Ce dossier épineux s’inscrit dans le contexte plus large des tensions récurrentes entre les deux voisins. Dès le samedi 12 juillet, le gouverneur militaire du Nord-Kivu, le général Evariste Kakule Somo, avait convoqué le consul ougandais basé à Beni pour exiger des éclaircissements sur cette réouverture frontalière orchestrée sans consultation. La réaction rapide des autorités provinciales puis nationales illustre la sensibilité extrême de ce dossier, où chaque mouvement est scruté à la loupe.
Lors du dernier conseil des ministres du 11 juillet, le gouvernement congolais avait déjà mandaté Thérèse Kayikwamba pour « obtenir des explications claires » de la part de l’Ouganda. La convocation de l’ambassadeur constitue donc l’aboutissement logique de cette instruction présidentielle. Les observateurs régionaux s’interrogent : cette initiative ougandaise traduit-elle une volonté de normalisation économique ou une tentative de légitimer l’occupation illégale par le M23 ?
Les implications sécuritaires de la réouverture de Bunagana sont particulièrement préoccupantes. Le poste frontalier donne accès à une zone instable où sévissent encore des groupes armés, compliquant davantage le travail des forces de stabilisation. Le risque de voir ce corridor utilisé pour des trafics transfrontaliers ou le renforcement des milices rebelles n’est pas négligeable, comme l’ont souligné plusieurs analystes des Grands Lacs.
Cette crise diplomatique survient alors que la région tente péniblement de tourner la page des conflits armés. La réaction mesurée mais ferme de Kinshasa démontre sa détermination à défendre sa souveraineté tout en privilégiant les canaux diplomatiques. Reste à savoir si Kampala fournira les explications exigées ou si cette affaire entraînera un nouveau refroidissement des relations entre les deux pays. L’évolution de cette situation pourrait bien reconfigurer les équilibres géopolitiques dans une région où la stabilité frontalière reste un défi permanent.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net