L’euphorie passagère née du déploiement des engins de l’Office des voiries et drainage (OVD) sur le boulevard Lumumba en juin dernier a cédé la place à une amère désillusion. À Kinshasa, où les attentes de modernisation des infrastructures routières atteignent des sommets, l’interruption soudaine des travaux de réhabilitation de cet axe stratégique sonne comme un camouflet. Comment expliquer cet abandon inopiné qui transforme un projet salvateur en cauchemar urbain ?
De Debonhomme à Bibwa, en passant sous le saut-de-mouton de Pascal, le paysage n’est plus que cicatrices béantes et graviers anarchiques. Les engins, symboles éphémères de progrès, ont disparu sans laisser d’adresse, abandonnant des tranchées qui menacent l’intégrité des véhicules et des riverains. « Ces caillasses laissées à l’abandon déchirent nos pneus et dégradent davantage la chaussée », fulmine Grégoire, habitant du quartier Bibwa. Un constat accablant qui soulève une question cruciale : l’OVD maîtrise-t-il véritablement ses dossiers ou navigue-t-il à vue ?
Devant l’Efobank et au Quartier 1, l’enfer quotidien des usagers atteint son paroxysme. Les crevasses non rebouchées et la poussière omniprésente transforment chaque trajet en parcours du combattant. Ironie cruelle du sort, certaines portions soigneusement préparées pour l’asphaltage ne sont plus que friches urbaines, témoins silencieux d’une ambition routière avortée. Cette situation aggrave le calvaire du transport urbain à Kinshasa, où les routes dégradées paralysent déjà l’économie locale.
Le mutisme persistant de la direction de l’OVD face aux sollicitations répétées interroge sur la gouvernance des grands chantiers publics. En refusant de s’expliquer sur cet arrêt brutal, l’institution entretient un climat de défiance toxique. Jusqu’où cette opacité peut-elle fragiliser la crédibilité des autorités en charge des infrastructures ? Dans une capitale où chaque chantier abandonné nourrit le cynisme populaire, cette gestion erratique des travaux risque de se payer au prix fort.
L’interruption du chantier du boulevard Lumumba dépasse le simple incident technique pour révéler une inquiétante fragilité systémique. Alors que Kinshasa étouffe sous le poids de ses infrastructures défaillantes, chaque faux pas institutionnel creuse le fossé entre les promesses affichées et les réalités du terrain. La balle est désormais dans le camp des décideurs : sauront-ils transformer cet échec cuisant en sursaut salutaire ou persisteront-ils dans cette dangereuse culture de l’inachevé ? L’avenir de la mobilité urbaine dans la capitale congolaise se joue aujourd’hui dans ces tranchées oubliées.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net