L’électricité de Kinshasa vibrait au rythme des débats passionnés ce 3 juillet, lorsque le Rassemblement des Étudiants Congolais (REC) a clôturé son Congrès panafricain par une revendication historique. Dans l’enceinte où se pressaient des centaines de jeunes venus de divers établissements supérieurs, une exigence unanime a jailli : la création immédiate d’un institut Patrice-Emery Lumumba, phare du panafricanisme contemporain. Trois jours durant, du 30 juin à cette clôture enflammée, ces héritiers de l’indépendance ont ravivé la braise d’une conscience continentale assoupie.
L’auditorium résonnait des voix de figures telles que Kemi Seba, venu du Bénin, ou Christian Nsung du Gabon, tissant avec Nkosi Mandela Mfumu Nkusu une tapisserie intellectuelle audacieuse. Chaque intervention, chaque débat sur l’unité africaine semblait faire trembler les murs des certitudes coloniales. Ribescin Ngandu, étudiant congolais transfiguré par l’événement, confiait d’une voix nouée par l’émotion : « Ce congrès a réveillé le lion en moi. Désormais panafricaniste, je combattrai toute oppression. » Cette métamorphose collective, palpable dans l’air chargé de Kinshasa, dessinait les contours d’un éveil patriotique sans précédent en RDC.
Mais au-delà des discours, une critique acerbe a émergé comme un couperet. Shekina Mangala, de l’Université Catholique Cardinal Malula, a lancé une interpellation cinglante aux autorités : « Pourquoi enseigne-t-on David Livingstone plutôt que Kimpwanza ? Nos enfants traitent nos héroïnes de sorcières tandis qu’ils vénèrent des explorateurs étrangers. En Chine, chaque élève connaît ses ancêtres ; ici, nous naviguons dans la confusion historique. » Cette plaidoirie pour un enseignement de l’histoire africaine authentique a suscité un tonnerre d’applaudissements, révélant une soif inextinguible de racines.
Face à ce constat implacable, Kemi Seba a présenté la pierre angulaire du renouveau : « L’institut Patrice Lumumba sera notre arme de construction massive. Comme nous l’avons semé durant ce congrès panafricain à Kinshasa, il propagera notre vision auprès des masses. Le temps est venu de privilégier les peuples africains, non les puissances étrangères. » Cette institution envisagée par le REC étudiants congolais ne se contenterait pas d’érudition ; elle ambitionne de forger des soldats de la pensée décoloniale.
Alors que les recommandations s’apprêtent à être remises au ministre de la Jeunesse, une question persiste : cet éveil patriotique marque-t-il l’aube d’une révolution pédagogique ? Le fantôme de Lumumba, convoqué dans l’appellation même de l’institut, semble hanter les couloirs du pouvoir. Ces étudiants, transformés en passeurs de mémoire, ont allumé un feu qui ne demande qu’à embraser les programmes scolaires. Leur combat dépasse les frontières de la RDC ; c’est à une reconquête de la dignité africaine qu’ils nous convient, livre après livre, conscience après conscience.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net