Le regard perçant de Patrice Lumumba, figé dans les archives photographiques, semble traverser le siècle pour interroger la conscience congolaise. Ce mercredi 2 juillet 2025, la République démocratique du Congo célèbre d’une voix grave le centenaire de la naissance de son Premier ministre martyr, né un même jour de juillet 1925. Dans l’air chargé de mémoire, Robert Ngambi, communicateur principal du Parti Lumumbiste Unifié (PALU), dessine les contours d’un héritage plus vibrant que jamais.
À travers les ondes de Radio Okapi, sa voix porte l’écho d’une doctrine oubliée : la transformation de la nature, ce levier essentiel que Lumumba voyait comme la sève du développement congolais. « Comment ne pas voir dans cette vision une prophétie inaccomplie ? » s’interroge-t-on devant les richesses naturelles demeurées en friche. Le centenaire Lumumba devient ainsi miroir tendu à une nation encore en quête de sa souveraineté économique.
Ngambi, tel un griot des temps modernes, rappelle la quintessence du combat lumumbiste : une nation intégrée, homogène, libérée des démons tribaux qui rongent son unité. « L’intégrité territoriale, la dignité, la liberté – ces mots résonnent-ils encore dans l’âme des dirigeants ? » questionne-t-il avec une pointe de mélancolie. Son analyse révèle l’urgence de ressusciter l’éthique du travail chère au héros national, ce pilier négligé de l’indépendance véritable.
Le constat tombe comme un couperet : « Soixante-cinq ans après l’indépendance, le Congo n’a pas démontré sa capacité à transformer sa nature généreuse. » Cette brûlante actualité de la doctrine transformation nature sonne comme un réquisitoire contre la dépendance persistante. L’appel de Ngambi à « l’auto-prise en charge par le travail productif » dessine les sillons d’une nouvelle révolution, pacifique celle-là, où la PALU doctrine puiserait aux sources lumumbistes.
Dans les rues de Kinshasa, pourtant, l’héritage Lumumba flotte tel un parfum entêtant. Son rêve d’une nation débarrassée des divisions ethniques garde une saveur d’inachevé. Où en est le rêve d’homogénéité nationale face aux fractures qui persistent ? La célébration du centenaire devient ainsi cérémonie du double regard : hommage à un passé glorieux, mais aussi examen critique d’un présent bancal.
Lumumba n’est pas une relique, nous souffle ce centenaire. Son ombre portée sur l’indépendance Congo reste un phare dans la tempête actuelle. Alors que les discours officiels se succèdent, la véritable commémoration résiderait dans l’audace de reprendre le flambeau : transformer enfin la nature congolaise en destin national, accomplissant ainsi la prophétie du premier martyr de l’indépendance.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net