Comment passer son examen quand on fuit les combats ? Cette question déchirante résume le drame vécu par des centaines d’enfants du territoire de Walikale, en République démocratique du Congo. Alors que l’examen national de fin d’études primaires (ENAFEP) s’est achevé ce mercredi 2 juillet 2025 dans l’ensemble du pays, la province éducationnelle Nord-Kivu 3, englobant les territoires de Masisi et Walikale, présente un bilan contrasté où l’insécurité a volé leur chance à des centaines de candidats.
Dans la sous-division de Walikale 3, le constat est accablant : 665 élèves finalistes ont purement et simplement raté l’ENAFEP. Michel Buingo, directeur provincial de cette circonscription scolaire, révèle des chiffres qui parlent d’eux-mêmes. Sur les 3.165 enfants inscrits pour cette session cruciale, seulement 2.500 ont pu se présenter dans les 9 centres d’examen prévus. Ce taux d’absentéisme scolaire record en RDC trouve sa source dans une cause unique et tragique : la fuite éperdue des familles devant les violences armées.
« Ces enfants qui ont fui avec leurs parents viennent de rater l’examen et du coup l’année devient blanche pour eux », déplore M. Buingo. Son témoignage, livré à notre rédaction, peint le désarroi de ces déplacés de l’éducation. La majorité des absents errent dans la brousse, sans possibilité de rejoindre les centres d’examen. Une génération sacrifiée qui devra attendre 2026 pour tenter à nouveau de franchir le cap de la 6e primaire, perdant ainsi une année entière de scolarité – un luxe que peu peuvent se permettre dans cette région instable.
L’ironie cruelle de la situation ? L’ENAFEP s’est pourtant déroulé contre toute attente dans des zones réputées hautement risquées comme Buleusa, Kashebere et Kibati. Des enseignants et surveillants ont bravé les dangers pour assurer la tenue des épreuves, montrant un courage quotidien face à l’insécurité au Nord-Kivu. Mais cette résilience ne suffit pas à compenser l’exode massif des populations.
Cette situation met en lumière un problème structurel : l’accès à l’éducation des déplacés en RDC reste un défi humanitaire majeur. Alors que le gouvernement promet une école pour tous, la réalité sur le terrain révèle des failles béantes. Comment garantir le droit fondamental à l’instruction quand les salles de classe se vident au rythme des affrontements ? La question hante les acteurs locaux qui voient, impuissants, l’avenir de ces enfants s’évaporer dans la fumée des conflits.
Les conséquences vont bien au-delà d’un simple examen raté. Pour ces 665 élèves de Walikale, c’est une porte qui se ferme – celle de l’entrée en secondaire – aggravant le risque de décrochage définitif. Dans une région où seulement 67% des enfants achèvent le cycle primaire selon les dernières statistiques, chaque élève perdu représente un échec collectif. Les solutions ? Elles passent par une sécurisation durable des zones rurales et des mécanismes d’urgence pour les déplacés éducation RDC, incluant des centres d’examen mobiles ou des sessions de rattrapage. Sans cela, l’ENAFEP restera, dans ces contrées meurtries, un symbole des inégalités scolaires nées de la guerre.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
