Dans un geste politique lourd de symboles, le Président Félix Tshisekedi a poursuivi mercredi sa stratégie d’ouverture en recevant Adolphe Muzito, ancien Premier ministre et figure de l’opposition. Cette rencontre, qui fait suite à l’entretien avec Martin Fayulu, dessine-t-elle les contours d’un dialogue politique RDC inédit ? Les deux hommes ont échangé près de trois heures sur les défis brûlants de la nation, dans un climat décrit comme « constructif » par les sources présidentielles.
Selon les comptes-rendus, Muzito a salué les avancées diplomatiques du chef de l’État, notamment la sensibilisation internationale sur le rôle du Rwanda dans la déstabilisation de l’Est congolais. Pourtant, derrière les louanges, perce une critique en filigrane : l’ancien Premier ministre a insisté sur la nécessité d’explications gouvernementales concernant le controversé contrat économique avec les États-Unis. « Il est normal que cet accord soit l’objet de critiques », aurait-il déclaré, posant ainsi une pierre dans le jardin de l’exécutif.
L’ouverture la plus significative réside dans la proposition de Muzito : le leader de Nouvel Élan s’est dit prêt à participer à un gouvernement union nationale si ses idées y trouvent écho. Cette déclaration, relayée par l’Agence congolaise de presse, pourrait marquer un tournant dans le paysage politique congolais. Le président aurait-il trouvé en Muzito un allié capable de légitimer sa démarche inclusive face aux sceptiques ?
Plus qu’une simple poignée de main, cette entrevue scelle une convergence stratégique face aux défis sécuritaires. Comme le souligne Info 27, Tshisekedi transforme l’unité nationale en « arme d’avenir » contre les menaces régionales. Le dialogue devient sa boussole, mais cette orientation suffira-t-elle à juguler les conflits qui ravagent l’Est depuis des décennies ? Muzito lui-même en doute, proposant plutôt un dialogue national inclusif couplé à des réformes structurelles RDC urgentes.
L’ancien locataire de la Primature a martelé la nécessité de moderniser l’appareil étatique, un leitmotiv qui résonne comme un avertissement : sans transformations profondes, les initiatives de paix resteront lettre morte. Son diagnostic est sans appel : « Le plus urgent est que des réformes importantes soient engagées ». Une position qui rejoint étrangement les critiques de la société civile sur l’inertie administrative.
Cette Tshisekedi Muzito rencontre s’inscrit dans la dynamique des consultations politiques d’avril dernier. En ralliant progressivement les caciques de l’opposition, le chef de l’État tisse patiemment sa toile unitaire. Mais gare aux illusions : si Muzito offre son soutien conditionnel, il garde la mémoire des anciens premiers ministres écartés du pouvoir réel. La véritable question demeure : cette alliance tactique survivra-t-elle à l’épreuve des réformes controversées et de la gestion du conflit Est Congo ?
Alors que Kinshasa bruisse de rumeurs sur une prochaine annonce gouvernementale, une évidence s’impose : Tshisekedi joue son va-tout sur l’échiquier politique congolais. Son pari ? Transformer les critiques d’hier en piliers d’un édifice national fragile. Mais comme le rappelle amèrement l’histoire récente, les gouvernements d’union sacrée congolais ont souvent accouché de compromis boiteux plutôt que de solutions durables.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
