Une rivière agonisante charriant des montagnes d’ordures, des maisons submergées à chaque averse, une population prisonnière de ses propres déchets : voilà le calvaire quotidien des habitants de Yolo Sud dans la commune de Kalamu. Le cours d’eau traversant les zones Kikwit et Ezo Camp Mpizi, transformé en égout à ciel ouvert, menace désormais la santé publique et l’intégrité des foyers riverains. Comment en est-on arrivé à cette situation catastrophique où la nature, étouffée par les immondices, se venge par des inondations destructrices ?
Le diagnostic est sans appel : la rivière Kalamu étouffe sous une accumulation monstre de déchets ménagers. Des témoignages recueillis sur place révèlent une double catastrophe écologique et urbanistique. Des riverains, y compris des figures d’autorité locales, ont grignoté illégalement le lit de la rivière, réduisant comme peau de chagrin sa capacité d’écoulement. Pire encore, des pousse-pousseurs déversent quotidiennement des ordures directement dans les eaux, souvent payés par des habitants désespérés tentant de protéger leurs parcelles de l’érosion. Cette pratique insensée transforme le cours d’eau en bombe sanitaire à retardement.
Les conséquences sont tangibles et violentes. « Dès que le ciel se met à pleurer, la rivière vomit des torrents de déchets dans nos cours », témoigne un résident de l’avenue Kintona, le visage marqué par l’épuisement. Les inondations à Yolo Sud ne se contentent pas d’envahir les parcelles ; elles charrient un cocktail nauséabond de détritus en décomposition, exposant les enfants aux bactéries et aux maladies hydriques. Mireille K., habitante du quartier, alerte d’une voix tremblante : « Nous vivons entourés de microbes et d’odeurs pestilentielles. Jusqu’à quand devrons-nous attendre avant qu’un drame ne survienne ? »
L’inaction des autorités face à cette pollution de la rivière Kalamu cristallise la colère. Malgré des alertes répétées au bourgmestre de la commune, aucune mesure concrète n’a été engagée. Les riverains se souviennent amèrement de la seule intervention significative : un curage effectué en 2023 par un candidat aux législatives, offrant un répit éphémère. Depuis, les dépôts sauvages ont repris de plus belle, illustrant l’échec des politiques de gestion des déchets à Kinshasa. Cette négligence transforme la crise environnementale en crise sociale, minant la confiance des populations envers leurs institutions.
Face à l’urgence, les habitants réclament trois actions immédiates : un curage en profondeur de la rivière jusqu’au pont Kikwit avant la fin de la saison sèche, une réglementation drastique contre les dépôts illicites, et une présence renforcée des services d’assainissement. Sans cela, la prochaine saison des pluies pourrait déclencher une catastrophe humanitaire dans ce secteur déjà vulnérable. La rivière Kalamu, artère vitale devenue veine polluée, supplie qu’on lui rende sa dignité. Son sort tragique est un miroir tendu à toute la capitale congolaise : jusqu’où laisserons-nous notre environnement se dégrader avant d’agir ?
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd
