À Kinshasa, Josué, 24 ans, consulte frénétiquement son smartphone entre deux cours. « Pourquoi attendre le journal de 20h quand TikTok me montre l’actualité en direct ? » Ce réflexe illustre une révolution silencieuse : selon l’étude du Groupe Target sur l’audience médiatique RDC, 55% des Congolais placent désormais internet et les chaînes câblées en tête de leurs sources d’information, reléguant la radio (44%) et la presse écrite (1%) à l’arrière-plan. Une bascule historique révélée ce jeudi 19 juin, fruit d’une enquête menée début mars dans les 26 provinces.
Cette percée du numérique, scrutée par le groupe Target depuis neuf ans, n’est pourtant pas uniforme. Dans le Katanga, au Kivu ou au Kongo Central, l’internet Congo séduit massivement les jeunes et les classes moyennes. Serge Mumbu, directeur général de Target, analyse : « La croissance exponentielle traduit une soif de plateformes interactives. À Kinshasa, la radio ne pèse plus que 6% de l’audience ! » Une réalité qui pose crûment la question : les médias traditionnels sont-ils condamnés ?
Pourtant, dans l’ombre des villes connectées, la radio résiste là où le réseau électrique vacille. Au Grand Kasaï, à Bandundu ou dans l’Équateur, le transistor reste roi. « Comment s’informer quand les coupures durent des semaines ? », interroge une habitante de Mbuji-Mayi. Ces zones, où l’accès au numérique bute sur des infrastructures défaillantes, maintiennent la radio presse écrite en vie – du moins temporairement. Car l’étude groupe target prévoit un scénario noir : d’ici 2028, télévision hertzienne et journaux papier pourraient quasiment disparaître.
Le téléphone portable, présent dans 97% des foyers utilisant internet et 60% des foyers radio, devient l’outil incontournable de cette mutation. Cette omniprésence signe-t-elle la fin des médias unidirectionnels ? Les données recueillies par Target SARL révèlent une exigence croissante : le public réclame des enquêtes fouillées et des formats innovants. « On ne peut plus se contenter d’un seul canal », insiste Mumbu, pressant les rédactions de migrer vers les médias numériques Kinshasa.
Cette fracture médiatique reflète les contrastes congolais : d’un côté, une jeunesse urbaine avide de contenus interactifs ; de l’autre, des régions où l’information reste tributaire des piles AA. La transition numérique, aussi inéluctable soit-elle, devra composer avec cette dualité. Car si internet redessine l’audience médiatique RDC, son règne sans partage bute encore sur l’accès à l’énergie – défi aussi crucial que l’extension du réseau 4G.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net