Une trentaine de civils ont été sauvagement exécutés lors d’attaques menées par les rebelles des Forces Démocratiques Alliées (ADF) dans le secteur des Bapere, territoire de Lubero au Nord-Kivu. Ces violences, survenues le week-end dernier dans les sites miniers Angola 1 et Angola 2, ciblaient des creuseurs artisanaux pris au piège dans cette zone enclavée du groupement Bapukara. Selon Macaire Sivikunula, chef de secteur des Bapere, les victimes ont été massacrées à la machette ou ont péri par noyade en tentant de fuir à travers la rivière, seule issue possible.
Comment échapper à une mort certaine ? Les témoignages recueillis décrivent une situation de cauchemar. Les assaillants, identifiés comme des éléments du groupe ADF conduit par le chef Abouakasi, ont encerclé les villages miniers. Les civils, coincés dans un véritable cul-de-sac, ont vu leur unique échappatoire coupée par le cours d’eau. Pour beaucoup, la tentative désespérée de traversée s’est soldée par une noyade. Ce massacre intervient dans un contexte sécuritaire particulièrement tendu au Nord-Kivu, où les violences sur les sites miniers congolais atteignent un paroxysme inquiétant.
Ces exactions constituent une réponse directe aux opérations militaires conjointes menées par les armées congolaise et ougandaise (FARDC-UPDF). Depuis deux semaines, une offensive ciblait le bastion ADF de la colline Ekenye, située à la limite entre la chefferie des Baswagha et le secteur des Bapere. La destruction de ce camp samedi dernier aurait provoqué la fuite des combattants islamistes vers les zones minières avoisinantes. « Dans leur retraite, les ADF se sont repliés vers Angola 1 et 2 où ils ont perpétré ces représailles sanglantes », a précisé le chef Sivikunula. Le conflit de Lubero prend ainsi une tournure plus meurtrière que jamais.
Le bilan provisoire fait état de 35 morts, mais pourrait s’alourdir selon les sources locales. Face à cette recrudescence des attaques, les autorités lancent un appel urgent à l’évacuation des populations des zones reculées. « Aux habitants de Manzia et Magogo, il serait préférable de quitter ces forêts pour se regrouper à Mangurejipa », a insisté le chef de secteur. Un choix cornélien qu’il justifie par cette formule glaçante : « Entre la mort de la faim et la mort tragique, qu’ils choisissent le moindre mal ». Cette mesure vise à faciliter les opérations de traque contre ces rebelles islamistes de l’Est-Congo tout en protégeant les civils.
Cette tragédie s’inscrit dans une dynamique sécuritaire dégradée depuis juin 2023, lorsque les combattants ADF, chassés de Beni et Mambasa, se sont implantés dans la région des Bapere. Leur présence a déjà forcé l’abandon de nombreux carrés miniers et terres agricoles, concentrant les populations dans des zones supposées sécurisées comme Manguredjipa, Nziapanda et Biambwe. Après une année de relative accalmie, la reprise des opérations militaires en profondeur explique la récente escalade des hostilités et des massacres de civils. Les forces coalisées entendent désormais « nettoyer la zone et anéantir ce phénomène » selon les termes du responsable local, mais à quel prix humain ?
La région du Nord-Kivu reste ainsi prisonnière d’un cycle infernal où les représailles des groupes armés frappent prioritairement les civils. Les sites miniers artisanaux, vitaux pour l’économie locale, se transforment en pièges mortels. Alors que les opérations militaires s’intensifient contre les ADF, la protection des populations vulnérables apparaît plus que jamais comme un défi majeur. Comment briser cette spirale de violence qui ensanglante périodiquement le territoire de Lubero ? La réponse des autorités, tant sur le plan sécuritaire qu’humanitaire, sera déterminante pour l’avenir immédiat de la région.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd