30.2 C
Kinshasa
dimanche, juin 8, 2025

Toute l'Actualité RDC, en Direct et en Détail

AccueilActualitéSociétéIturi : 716 déplacés handicapés abandonnés à leur sort sur le site...

Ituri : 716 déplacés handicapés abandonnés à leur sort sur le site de Rhoe

Le visage creusé par la faim, Kambale serre contre lui sa béquille rouillée. « Même chercher de l’eau devient un calvaire », murmure ce père de famille amputé, devenu symbole du drame silencieux du site de déplacés de Rhoe, en Ituri. Comme lui, 716 personnes en situation de handicap survivent ici dans un dénuement absolu, oubliées de tous sous le ciel indifférent du territoire de Djugu. Leur existence n’est qu’un fragile fil tendu au-dessus du précipice.

Selon le comité local de gestion, ces déplacés handicapés subissent une double peine : leurs limitations physiques, souvent aggravées par les traumatismes de la fuite, les empêchent d’accéder aux rares ressources disponibles. Pis encore, l’insécurité chronique qui règne dans cette région les transforme en prisonniers volontaires de leur misérable abri. Comment cultiver un lopin quand les groupes armés rôdent ? Comment fuir une attaque quand la marche est un supplice ? Cette crise humanitaire à Djugu prend ici les traits d’une tragédie dans la tragédie.

Leur quotidien est un inventaire de manques : ni vivres, ni médicaments, ni savon, ni vêtements décents. Parmi eux, des dizaines d’enfants regardent passer les saisons sans jamais franchir le seuil d’une école. « Nos enfants handicapés deviennent des fantômes parmi les fantômes », déplore une membre du comité, sous couvert d’anonymat par crainte de représailles. Le site de Rhoe, qui abrite pourtant près de 53 000 âmes fuyant les violences des milices, semble avoir scellé le sort de ses plus vulnérables.

Face à cette urgence, les responsables locaux lancent un appel déchirant. Ils réclament d’urgence des activités génératrices de revenus adaptées, des formations professionnelles et surtout, surtout, le retour de la sécurité dans cette zone en proie à l’instabilité depuis sept longues années. « Sans paix, nos appels restent des cris dans le désert », insiste un porte-parole, soulignant que des milliers de déplacés rêvent simplement de retrouver leurs terres ancestrales.

Mais l’horreur ne s’arrête pas là. En 2024, plus de 300 cas de violences sexuelles ont été documentés sur ce même site de Rhoe, situé à 100 km de Bunia. Un chiffre glaçant révélé par l’infirmier titulaire de la zone de santé de Blukwa, où des fillettes de 12 ans tentent de reconstruire leur corps brisé. « La prostitution de survie devient l’ultime recours pour nombre de jeunes déplacées », confirme le soignant, redoutant une explosion des infections sexuellement transmissibles.

Cette spirale infernale interroge cruellement la réponse des autorités congolaises et de la communauté humanitaire. Comment expliquer qu’à quelques kilomètres seulement des centres urbains, des êtres humains soient réduits à une telle extrémité ? L’insécurité persistante en Ituri sert-elle de prétexte commode à l’inaction ? La vulnérabilité sur le site de Rhoe est un miroir tendu à notre humanité défaillante. Tant que les déplacés handicapés de Djugu devront mendier leur survie, tant que leurs enfants grandiront dans l’ombre de l’analphabétisme, la promesse d’une RDC solidaire restera lettre morte. Leur calvaire nous accuse tous.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

Commenter
Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
Actualité Liée

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici


Actualité Populaire Liée

Actualité Populaire RDC

Derniers Appels D'offres