Dans la localité de Tsere, en périphérie de Bunia, un vent d’espoir souffle sur des vies autrefois marquées par la violence. « J’ai troqué mon arme contre une houe. Aujourd’hui, je nourris ma famille sans craindre les balles », confie un ancien combattant de la milice Zaïre, l’un des 48 bénéficiaires d’un projet de réinsertion communautaire piloté par le PDDRCS avec l’appui de la MONUSCO.
Ce samedi 25 mai, seize ex-miliciens et trente-deux membres de la communauté ont reçu des moyens pour reconstruire leur avenir. Vingt vaches, des outils agricoles et des formations professionnelles symbolisent cette transition vers la paix. Une initiative qui interroge : et si le développement était la clé d’un désarmement durable en Ituri ?
Le coordonnateur du PDDRCS, Jean Dedieu Ntanga Tita, insiste sur cette approche intégrée : « Ce projet à Tsere brise le cycle infernal des conflits. On ne peut pas demander à un homme de déposer son arme sans lui tendre une alternative viable. » Un discours relayé par Khaled Ibrahim de la MONUSCO : « Vos mains, désormais outillées, doivent devenir des instruments de prospérité. »
Derrière ces symboles forts se cachent des défis colossaux. Comment garantir que ces vaches – richese mobile – ne deviennent pas source de nouveaux conflits fonciers ? La réponse semble résider dans le modèle choisi : une réinsertion collective mêlant ex-combattants et civils, pour recoudre le tissu social déchiré.
Parmi les bénéficiaires, un ancien formateur militaire livre un plaidoyer poignant : « À mes frères encore dans le maquis : venez goûter à cette paix que nos champs produisent. » Mais son appel soulève une question cruciale : les communautés sont-elles prêtes à accueillir ceux qui, hier encore, semaient la terreur ?
Le PDDRCS mise sur l’ancrage territorial. En choisissant Tsere, foyer de tensions récurrentes, le programme transforme une poudrière en laboratoire de coexistence. Reste à voir si ce modèle pourra être répliqué à plus de 1 000 ex-combattants en attente dans le territoire de Djugu.
Les Nations Unies y voient un test décisif pour la stabilisation de l’Ituri. « Chaque vache distribuée today est un pari sur l’avenir », analyse un expert local. Pari audacieux, car les racines du conflit – accès à la terre, justice transitionnelle, inclusion économique – demandent plus qu’un cheptel.
Ce projet illustre cependant une évolution stratégique : lier désarmement et développement pour éviter les rechutes. Une leçon tirée des échecs passés où les programmes de DDR se limitaient trop souvent à des formations éphémères.
En filigrane, un enjeu sociétal majeur se dessine : la réconciliation nationale passera-t-elle par l’autosuffisance des anciens belligérants ? À Tsere, on y croit dur comme fer. Les premiers bénéficiaires ont déjà constitué une coopérative agricole. Leur prochain combat ? Transformer leur récolte en farine plutôt qu’en kalachnikovs.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net