La chefferie de Babila Babombi, dans le territoire de Mambasa (Ituri), fait face à une crise économique d’une ampleur inquiétante. En l’espace de quelques jours, les prix des denrées alimentaires ont connu une hausse vertigineuse, selon un rapport alarmant de l’ONG Convention pour le respect des droits de l’Homme et de l’environnement. Une bassine de farine de manioc, jadis accessible à 5 dollars américains, frôle désormais les 10 dollars. Quant à l’épi de maïs grillé, son prix a quadruplé, passant de 300 à 1 000 francs congolais. Une inflation qui frappe de plein fouet des ménages déjà fragilisés par des années de conflits.
Comment expliquer cette flambée des prix dans une région pourtant considérée comme le grenier agricole de l’Ituri ? L’analyse des causes révèle un cocktail explosif. D’un côté, l’insécurité persistante liée aux groupes armés entrave l’accès aux champs. « Certaines zones sont devenues des no man’s land à cause des barrières illégales érigées par des milices », dénonce Rams Malikidogo, secrétaire de l’ONG. Résultat : près de 40% des terres cultivables seraient inexploitables selon des sources locales.
Parallèlement, un phénomène plus structurel aggrave la situation : l’abandon progressif des cultures vivrières au profit du cacao. Cette spéculation agricole, motivée par des rendements financiers immédiats, réduit drastiquement l’offre en produits de première nécessité. Une stratégie à courte vue qui transforme la sécurité alimentaire en variable d’ajustement économique.
Les conséquences se propagent comme une onde de choc. Le transport entre Beni et Biakato, artère vitale pour l’approvisionnement, a vu ses tarifs doubler (5 à 10 dollars). Une augmentation qui se répercute mécaniquement sur les prix finaux, créant un cercle vicieux inflationniste. « Chaque franc supplémentaire dans le transport se traduit par 2 à 3 francs en plus sur le marché », précise un économiste local sous couvert d’anonymat.
Face à cette crise multidimensionnelle, les alertes se multiplient. Plus de 60 000 personnes seraient immédiatement menacées par l’insécurité alimentaire dans la chefferie selon des estimations préliminaires. Les organisations humanitaires pointent un risque de pénurie généralisée si des mesures urgentes ne sont pas prises. La suspension des taxes illégales sur les cultivateurs et la sécurisation des axes routiers figurent parmi les priorités identifiées.
À plus long terme, cet épisode interroge la résilience des systèmes agricoles congolais face aux chocs sécuritaires. Alors que la RDC ambitionne de réduire sa dépendance aux importations alimentaires, la situation de Mambasa sonne comme un avertissement. Sans investissements massifs dans la protection des producteurs et la diversification des cultures, le spectre de crises récurrentes plane sur toute la région.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net