Dans les profondeurs du Maniema, une révolution silencieuse prend racine. Trente-deux kilomètres de pistes agricoles et cinq ponts stratégiques viennent de fissurer l’isolement séculaire du groupement Kori. Une percée qui libère autant qu’elle interroge : jusqu’où ira cette métamorphose écologique et sociale portée par le programme REDD+ PIREDD-MANIEMA ?
Une artère vitale pour des communautés enchaînées
L’axe Olangate-Liwamba Lokoko, autrefois cicatrice boueuse dans le paysage, pulse désormais au rythme des charrettes chargées de récoltes. « Avant, nos récoltes pourrissaient sur place », témoigne un agriculteur, les mains encore calleuses de décennies de lutte contre l’enclavement. Le chiffre frappe comme un coup de machette dans la brousse : +166% sur le prix du sac de paddy. De 30 000 à 80 000 francs congolais, la valeur ajoutée se mesure en sourires retrouvés.
REDD+ PIREDD-MANIEMA : quand l’écologie paie ses dettes
Derrière ces chiffres, un modèle innovant se dévoile. Le mécanisme de paiement pour services environnementaux, fer de lance de la coopération allemande en RDC, transforme la conservation forestière en levier économique. « Chaque hectare reboisé devient un compte en banque pour nos enfants », explique Darius Omari de l’ANAPAC. Le programme, financé par CAFI et FONARED, tisse un filet de sécurité entre forêt et développement.
Le Parc de la Lomami respire enfin
À 68 km de Kindu, les ponts touristiques de Kori enjambent plus que des rivières. Ils symbolisent le passage d’une économie de prédation à une agriculture durable. La pression sur le parc national de la Lomami s’allège, mètre après mètre de pistes aménagées. « Les chasseurs deviennent cultivateurs », constate un agent de conservation, soulagé de voir diminuer les conflits homme-faune.
L’ombre portée du succès
Mais cette renaissance fragile suspend à un impératif : l’entretien des infrastructures. « Ces ponts sont notre corde ombilicale avec le monde », insiste une commerçante, consciente que négligence rimerait avec rechute. Le gouvernement provincial, par la voix de son représentant, lance un avertissement clair : « La durabilité exige autant d’efforts que la construction ».
Qui aurait cru que des pistes agricoles pourraient redessiner le destin d’une région ? Le Maniema écrit ici un chapitre crucial de sa transition écologique. Entre forêts qui reprennent leur souffle et sacs de paddy qui prennent de la valeur, chaque kilomètre ouvert sonne comme un défi : celui de concilier urgence climatique et justice sociale.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net