Le Kongo Central vient d’écrire une nouvelle page de son développement infrastructuel. La pose réussie de la première chaussée asphaltée sur la Route Nationale 12, entre Manterne et Tshela, matérialise une avancée technique majeure dans ce chantier phare du Programme Sino-Congolais. Un symbole fort pour cette artère stratégique reliant les zones agricoles du sud-ouest de la RDC à ses voisins angolais et congolais.
Ce jalon technique, réalisé sous la supervision conjointe de la Société d’infrastructures sino-congolaise (SISC) et de l’Agence Congolaise de Grands Travaux (ACGT), répond à un protocole exigeant : température de pose maintenue à 150°C, compactage réalisé avec des rouleaux vibrants de 12 tonnes, densité vérifiée au densitomètre nucléaire. « Tous les paramètres respectent les normes du cahier des charges », confirme Jean-Pierre Vulalo Tsongo, chef de mission ACGT.
Quel impact concret cette avancée technique aura-t-elle sur le quotidien des populations ? D’abord une révolution logistique pour les producteurs agricoles de la région du Bas-Congo, grenier alimentaire historique. « Cette zone nourrit près de 40% du pays », rappelle Vulalo Tsongo. Le tracé de 97 km à asphaltier permettra de réduire de 60% le temps de transport des denrées périssables vers Kinshasa et les pays frontaliers.
La dimension géostratégique n’est pas moins cruciale. Cette route constitue le maillon manquant dans le corridor Douala-Brazzaville-Kinshengani-Lubumbashi. Son achèvement facilitera les étransfrontaliers avec l’Angola (dont les échanges commerciaux avec la RDC ont atteint 1,2 milliards USD en 2023) et le Congo-Brazzaville. Un atout pour l’intégration sous-régionale dans la zone CEMAC-SADC.
Le directeur général du projet, Chang JianQing, détaille les prochaines étapes : « Après ce tronçon-test au PK96+600, nous passerons à la phase intensive avec l’asphaltage de 15 km mensuels ». Un calendrier rendu possible par les investissements préalables : 12 bulldozers, 8 finisseurs et 2 centrales d’enrobage mobilisés sur site.
Reste le défi du financement. Inscrit dans le contrat sino-congolais « infrastructures contre ressources », ce chantier de 287 millions USD symbolise les nouvelles dynamiques de coopération Sud-Sud. Sa réussite technique actuelle constitue un test pour les 14 autres projets routiers du même programme.
Aux sceptiques qui doutaient des capacités d’exécution de SISC, les premiers résultats répondent par les chiffres : 87% des travaux préparatoires achevés en 5 mois, 42 km de drainage installés, 15 ouvrages hydrauliques réhabilités. La société a su adapter ses méthodes aux spécificités locales, combinant haute technologie et main-d’œuvre locale (65% des 850 ouvriers).
Ce projet dépasse la simple logique de désenclavement. Il s’inscrit dans le plan d’émergence 2030 du gouvernement, visant à porter la part des infrastructures dans le PIB de 3% à 8%. Une nécessité pour un pays où seulement 12% du réseau routier national est asphalté, selon les données de la Banque Mondiale.
La route nationale 12 pourrait devenir la colonne vertébrale d’un nouveau pôle économique intégrant agriculture industrielle, zones franches logistiques et plateformes multimodales. Reste à pérenniser ces investissements par un plan de maintenance adapté – le talon d’Achille de nombreux projets africains.
Alors que les premiers véhicules s’élanceront sur ce bitume encore fumant d’ici octobre 2024, tous les regards sont tournés vers Kinshasa et Pékin. La réussite de ce chantier-test pourrait accélérer le déblocage des 4,5 milliards USD prévus pour les infrastructures routières dans le nouveau contrat de partenariat sino-congolais en négociation.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
