La province de la Tshopo vient de franchir une étape cruciale dans la sécurisation de son système de santé. Jeudi 15 mai, le Gouverneur Paulin Lendongolia a officiellement lancé la reconstruction de l’entrepôt de la Centrale de distribution des médicaments essentiels de Kisangani (CAMEKIS), réduit en cendres en août 2024. Un projet à 386.000 USD qui suscite autant d’espoirs que de questions sur la résilience sanitaire régionale.
Imaginez une réserve vitale capable d’alimenter en traitements des milliers de patients, partie en fumée en quelques heures. L’incendie de 2024 avait consumé 1.624 m³ de médicaments, plongeant la lutte contre le VIH et la tuberculose dans une crise sans précédent. « Des ruptures de stocks ont exposé les malades à des risques de résistance médicamenteuse », alerte Sœur Jeanne-Marie Amisi, présidente intérimaire de la CAMEKIS. Une vulnérabilité dangereuse dans une région régulièrement confrontée à des épidémies.
Un investissement à hauts risques
Le nouveau bâtiment – 520 m² sur un niveau – intégrera-t-il les leçons du passé ? Le Gouverneur insiste sur « un dispositif anti-incendie fonctionnel et permanent », condition sine qua non pour sécuriser les antirétroviraux et autres traitements sensibles. Avec un calendrier serré (10 mois de travaux) et un financement mixte (État central et CAMEKIS), le défi technique s’annonce de taille.
Qu’adviendrait-il en cas de nouvelle catastrophe ? La question hante les acteurs de santé. La CAMEKIS approvisionne 70% des structures médicales de la Tshopo, des hôpitaux publics aux dispensaires confessionnels. Sa mission : fournir des médicaments qualité-validés à prix contrôlés. Un maillon faible dont dépend la stabilité épidémiologique de toute la province.
Une course contre la montre sanitaire
Les 386.000 USD engagés couvriront-ils les besoins réels ? Les spécialistes soulignent l’urgence d’une logistique renforcée : « Entre les ruptures de chaîne du froid et les stocks critiques, chaque jour compte », rappelle un pharmacien de Kisangani sous couvert d’anonymat. Le gouvernement provincial promet des fonds complémentaires, mais aucun montant ni calendrier précis n’ont filtré.
Cette reconstruction symbolise-t-elle un tournant dans la gestion des crises sanitaires congolaises ? Si le projet aboutit, il pourrait servir de modèle pour d’autres régions. Mais gare aux fausses notes : en 2022, un entrepôt similaire à Kananga avait été reconstruit sans normes anti-incendie, selon un rapport du Ministère de la Santé.
Prévention épidémique : priorité absolue
Avec la saison sèche qui approche, les risques de choléra et de méningite imposent une vigilance accrue. « Sans stock tampon de médicaments, une épidémie deviendrait ingérable en 72 heures », met en garde un médecin de l’OMS en RDC. La CAMEKIS joue ici un rôle-clé : ses vaccins et kits d’urgence constituent la première ligne de défense contre les flambées infectieuses.
Au-delà des murs, c’est tout un écosystème pharmaceutique qui doit renaître. Les autorités devront trancher : privilégier une reconstruction rapide ou exiger des normes internationales coûteuses ? Le choix déterminera l’avenir sanitaire de 2,3 millions d’habitants dans la Tshopo.
Recommandations pratiques :
- Surveillance citoyenne des travaux via des comités locaux
- Formation obligatoire du personnel aux normes de sécurité
- Création d’un stock stratégique provincial décentralisé
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
