La République Démocratique du Congo fait face à une crise énergétique sans précédent. En 2024, la production électrique a chuté de 40% dans certaines centrales hydroélectriques, un effondrement directement lié à la dégradation accélérée des cours d’eau. Le fleuve Congo, artère vitale du pays, étouffe sous les déchets ménagers de Kinshasa tandis que le lac Kivu suffoque sous les rejets de Goma et Bukavu. Une hémorragie écologique qui paralyse les turbines.
Comment en est-on arrivé là ? Les bassins versants transformés en dépotoirs géants, le transport anarchique de grumes sur le fleuve, et surtout ces digues construites à la hâte sur le Lualaba et la Lufira. Ces barrages sauvages ont désorganisé le débit naturel, provoquant l’arrêt brutal des centrales de Nzilo, Mwadingusha et Koni dès novembre 2023. « La quantité et la qualité des eaux turbinées déterminent notre capacité de production », alerte un rapport interne de la SNEL obtenu par notre rédaction.
Les conséquences sont palpables : pendant les crues de janvier-février 2024, Inga 2 a vu sa production s’effondrer. Les digues illégales ont transformé les lacs Nzilo et Mwadingusha en bombes à retardement hydrologiques. Chaque interruption de turbine plonge des milliers de ménages dans le noir, tandis que les industries grincent des dents face aux délestages intempestifs.
Derrière ces chiffres chocs se cache un cercle vicieux. La baisse de production pousse les populations vers le charbon de bois, accélérant la déforestation. Cette dernière réduit à son tour la capacité des sols à réguler le cycle de l’eau, aggravant l’ensablement des centrales. Un véritable casse-tête environnemental qui menace le pacte social congolais.
La solution ? Elle passe par une gestion intégrée des bassins versants. Le fleuve Congo et ses affluents – Tshopo, Ubangi, Inkisi – ne sont pas de simples tuyaux industriels. Ces écosystèmes complexes nécessitent une protection renforcée contre les déchets ménagers et les pratiques d’exploitation prédatrices. La SNEL pourrait-elle devenir le fer de lance de cette reconquête écologique ?
L’urgence est triple : environnementale, énergétique et économique. Sans une action rapide pour assainir les cours d’eau et réguler les activités humaines, le pays risque de voir s’effondrer son réseau électrique. Les centrales hydroélectriques, fierté nationale, se transformeraient alors en monuments silencieux de notre incapacité à protéger nos ressources naturelles.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net