Kalemie étouffe sous les eaux. Trois jours de pluies torrentielles ont transformé le chef-lieu du Tanganyika en paysage de désolation. Le député Christian Mwando Nsimba Kabulo dresse un bilan glaçant : 1 800 ménages jetés à la rue, 17 écoles réduites à des amas de béton, le boulevard Lumumba submergé comme un navire en perdition. La Lukuga, rivière capricieuse, a rompu ses entraves, menaçant jusqu’aux ponts vitaux reliant la ville à son aéroport.
« Nos élèves risquent de perdre une année scolaire entière », alerte l’élu dans une motion poignante à l’Assemblée nationale. Les chiffres donnent le vertige : des centaines de familles entassées dans des abris de fortune, des dispensaires engloutis, des routes sectionnées comme par un coup de machette. Le lac Tanganyika lui-même semble avoir retourné sa colère contre ceux qui vivent sur ses rives.
Derrière ce déluge, une question brûlante : pourquoi Kalemie sombre-t-elle régulièrement sous les flots ? Les infrastructures obsolètes – ponts fissurés, systèmes de drainage fantômes – apparaissent comme des bombes à retardement. « Le curage de la Lukuga traîne depuis des années », rappelle un habitant joint par téléphone, voix brisée par l’émotion.
L’appel du parlementaire résonne comme un cri dans la tempête : « Que le gouvernement décrète l’urgence humanitaire ! ». Un plaidoyer qui cache une amertume plus profonde. « Nous ne sommes pas des citoyens de seconde zone », lance-t-il, visant directement la centralisation des secours autour de Kinshasa.
Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale, promet une transmission « immédiate » des demandes au gouvernement. Mais les mots peinent à convaincre. Dans les ruines des écoles de Kibirizi et Kabimba, des cartables flottent encore entre les décombres. Combien de cris d’alarme faudra-t-il pour que Kalemie ne sombre pas définitivement ?
Les spécialistes pointent une urgence écologique : déboisement massif des bassins versants, urbanisation anarchique, gestion désastreuse des cours d’eau. Chaque nouvelle saison des pluies devient une roulette russe pour les 400 000 habitants de la ville. « Sans solution structurelle, nous revivrons ce cauchemar en 2025 », prédit un ingénieur hydraulicien sous couvert d’anonymat.
Le compte à rebours est enclenché. Tandis que les autorités planchent sur des mesures d’urgence, des voix s’élèvent pour réclamer un plan Marshall écologique : reboisement intensif, modernisation du réseau hydrographique, normes de construction anti-inondations. La survie de Kalemie – et par extension de toute la région des Grands Lacs – se joue maintenant.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd