Dans un mouvement institutionnel scruté à la loupe, le Sénat de la République Démocratique du Congo a finalisé ce mercredi 7 mai 2025 sa composition après la validation des mandats de huit sénateurs issus des provinces du Kwilu et du Nord-Ubangi, ainsi que celui du suppléant de l’honorable Adolphe Lumanu Mulenda Bwana Nsefu. Une décision unanime qui clôture une étape protocolaire, mais soulève des interrogations sur les équilibres politiques dans un hémicycle désormais complet avec 108 élus et un sénateur à vie, Joseph Kabila. Derrière cette unanimité de façade, quels calculs se dissimulent dans l’agencement de ce puzzle législatif ?
La Commission Permanente des Affaires Juridiques et Administratives (PAJ) a joué son rôle d’arbitre en certifiant la régularité des dossiers examinés. Aucune objection n’ayant été soulevée, les nouveaux sénateurs – dont les noms résonnent comme un écho aux dynamiques provinciales – ont pu investir leurs sièges. Pour le Kwilu, Marianne Bakiele, Willy Itshundala Asang, Papy Labila Kalima et Jean-Philibert Mabaya Gizi rejoignent l’assemblée. Du Nord-Ubangi, Basile Bale Bila, Michel Kobanga Ngabila, Albert-Philippe Mobutu Giala Kasa et Anastasie Ngbako Mbilisi complètent ce tableau. Notons la symbolique présence d’Hervé Lumanu Nyembo, suppléant promu dans le sillage d’Adolphe Lumanu, désormais aux commandes administratives de la Cellule Desk Grands Lacs, structure clé sous l’égide de la Présidence.
Cette validation sans accroc interroge. Une unanimité parlementaire dans un contexte où les rivalités provinciales font habituellement trembler les procès-verbaux : simple formalité ou consensus orchestré ? Les observateurs noteront la rapidité du processus, contrastant avec les habituelles joutes procédurières. « Tout est dans l’ordre », assure un membre de la PAJ sous couvert d’anonymat, mais certains murmurent que les dossiers sensibles auraient été traités en amont, hors des projecteurs.
La complétude du Sénat marque un cap. Avec Joseph Kabila en sénateur à vie – pièce maîtresse d’un échiquier dont l’influence persiste malgré son retrait apparent –, l’institution incarne plus que jamais les tensions et alliances historiques. Les nouveaux élus du Kwilu et du Nord-Ubangi, régions aux enjeux socio-économiques complexes, porteront-ils une voix distincte ou se fondront-ils dans le moule majoritaire ? Leurs premiers votes seront décryptés comme des signaux politiques.
Reste la question de l’impact réel de cette complétion. Un Sénat au grand complet peut-il accélérer les réformes promises, ou risque-t-il de cristalliser les blocages ? La nomination d’Adolphe Lumanu à la Cellule Desk Grands Lacs, instance stratégique, ajoute une couche de symbolisme : certains y voient un pont entre le législatif et l’exécutif, d’autres un habillage technocratique de réseaux d’influence.
En filigrane, ce remaniement parlementaire pose la question de l’équilibre des forces à l’approche des prochains scrutins locaux. Les provinces récemment représentées auront-elles gain de cause dans les débats sur la décentralisation ou les budgets d’équipement ? Ou ne s’agit-il que d’un réajustement cosmétique dans un jeu plus vaste ?
Alors que les nouveaux sénateurs prennent place sous la coupole, les attentes sont doubles : prouver leur capacité à transcender les clivages régionaux et à impulser une dynamique législative palpable. Leur entrée en scène coïncide avec des dossiers brûlants – révision constitutionnelle, gestion des ressources minières, sécurité dans l’Est – qui testeront leur marge de manœuvre. Gageons que l’unanimité d’aujourd’hui ne préfigure pas un silence de complaisance demain.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd