Dans un contexte marqué par une crise sécuritaire prolongée dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), un nouveau chapitre de coopération internationale se dessine. La Première ministre Judith Suminwa a reçu ce lundi l’ambassadeur de Suède, Joakim Vaverka, pour des discussions stratégiques. Si les échanges s’inscrivent dans la tradition diplomatique, leur portée dépasse les simples formalités : sécurité, investissements et réponse humanitaire étaient au menu d’une rencontre révélatrice des priorités de Kinshasa.
Les deux parties ont abordé en détail la situation dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, où les groupes armés continuent de défier l’autorité de l’État. « La Suède soutient les efforts de stabilisation, notamment à travers des programmes de désarmement et de réinsertion », a souligné M. Vaverka. Un engagement qui s’appuie sur une présence suédoise remontant à 1881, marquée d’abord par des missions religieuses avant d’évoluer vers une coopération multiforme.
Mais au-delà de l’urgence sécuritaire, quel rôle peut jouer un pays nordique dans le développement congolais ? L’ambassadeur évoque des « opportunités concrètes » dans les secteurs minier, énergétique et agricole. Plusieurs entreprises suédoises manifesteraient un intérêt croissant pour le marché congolais, à condition que le climat des affaires s’améliore. Une perspective qui interpelle : comment concilier attractivité économique et souveraineté nationale dans un pays riche en ressources naturelles ?
Le volet humanitaire n’a pas été occulté. La Suède, contributeur historique aux fonds d’urgence des Nations unies, promet de maintenir son aide aux populations déplacées. Toutefois, M. Vaverka insiste sur la nécessité d’« une approche intégrée » mêlant assistance immédiate et solutions structurelles. Un discours qui rejoint celui du gouvernement congolais, déterminé à transformer l’essai après des décennies de dépendance à l’aide extérieure.
Analyste des relations internationales à l’Université de Kinshasa, le Pr Didier Mbenga tempère : « La Suède représente un partenaire modeste en volume, mais symboliquement important. Son positionnement neutre et son expertise en médiation pourraient influencer d’autres acteurs européens. » Reste à savoir si Stockholm utilisera sa présidence prochaine du Conseil de l’UE pour porter les préoccupations congolaises sur la scène internationale.
Cette rencontre intervient à un moment charnière pour la diplomatie congolaise. Alors que les relations avec certains partenaires traditionnels traversent des turbulences, Kinshasa semble diversifier ses alliances. La nomination récente de M. Vaverka – expert reconnu en résolution de conflits – comme ambassadeur suggère d’ailleurs un regain d’intérêt suédois pour la région des Grands Lacs.
En filigrane de ces discussions se profile la question des réformes structurelles. Le gouvernement Suminwa pourra-t-il concrétiser ses ambitions de bonne gouvernance et de transparence, condition sine qua non pour attirer des investissements durables ? Les prochains mois apporteront des éléments de réponse, notamment à travers la mise en œuvre du programme de coopération 2025-2028 actuellement en négociation.
Si les déclarations post-rencontre respirent l’optimisme de rigueur, les observateurs rappellent que la RDC a déjà connu des promesses non tenues de partenariats gagnant-gagnant. La différence se jouera cette fois dans la capacité à transformer les discours en projets tangibles – qu’il s’agisse de centrales hydroélectriques ou de programmes de réconciliation communautaire.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: primature.grouv.cd