L’entrée fracassante de Starlink sur le marché des télécommunications en République Démocratique du Congo (RDC) marque un tournant stratégique pour le pays. L’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications du Congo (ARPTC) a officiellement octroyé, vendredi, une licence de réseau et de services à Starlink DRC S.A, filiale locale du géant américain détenu par Elon Musk. Une décision saluée par l’Association Congolaise d’Accès à la Justice (ACAJ), qui y voit une « rupture salutaire » face aux pratiques monopolistiques des opérateurs historiques.
Selon les données de l’ARPTC, le secteur des télécoms en RDC affiche un taux de pénétration internet de 22,5 % en 2023, avec des disparités criantes entre zones urbaines et rurales. L’arrivée de Starlink, fort de ses 6 750 satellites opérationnels, promet une couverture haut débit à faible latence – jusqu’à 150 Mbps – y compris dans les régions reculées. Un argument de poids dans un pays où 70 % du territoire souffre d’un déficit infrastructurel chronique.
« Cette licence crée les conditions d’une concurrence saine », analyse un expert sectoriel sous couvert d’anonymat. Les tarifs pratiqués par les opérateurs locaux, actuellement 30 à 50 % plus élevés que la moyenne subsaharienne selon la Banque Mondiale, pourraient subir une pression baissière. Reste à voir si Starlink parviendra à adapter son modèle économique – des kits à 600 $ l’unité – au pouvoir d’achat congolais, où le PIB par habitant plafonne à 660 $.
Sur le plan géopolitique, cette avancée s’inscrit dans le cadre du rapprochement Kinshasa-Washington. Le département d’État américain y voit un « levier de développement numérique », tandis que le gouvernement congolais table sur un gain de 1,2 point de PIB d’ici 2025 grâce à l’inclusion numérique. Un pari audacieux, alors que seulement 18 % des Congolais utilisent régulièrement internet.
Mais l’enthousiasme ne doit pas occulter les défis. La régulation des fréquences, la cybersécurité et l’équité fiscale – Starlink bénéficie-t-il d’avantages spécifiques ? – constituent autant de questions en suspens. L’ARPTC se veut rassurante : « Le cadre juridique garantit une concurrence loyale et la protection des données des abonnés ».
À l’heure où l’Afrique subsaharienne accuse un retard de 34 % en matière de connectivité selon l’UIT, la RDC pourrait devenir un laboratoire de la révolution satellitaire. Si Starlink tient ses promesses techniques, le pays verrait sa productivité sectorielle augmenter de 12 à 15 % selon les projections. Reste à transformer l’essai opérationnel en impact socio-économique tangible pour 95 millions de Congolais.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
