« Nous ne pouvons plus nous contenter de discours. L’heure est à l’action concrète pour les jeunes et les femmes africains. » Ces mots de Chris Ngal, président de la SYJACPS, résonnent comme un mantra lors de la récente visioconférence organisée par la Synergie des Jeunes Africains pour la Consolidation de la Paix et la Sécurité. Le 3 mai dernier, des représentants venus de tout le continent ont planché sur les préparatifs du Sommet africain sur l’Agenda Femme, Jeunesse, Paix et Sécurité, un événement prévu pour septembre 2025 qui pourrait marquer un tournant dans les dynamiques sociales du continent.
Derrière les écrans, l’urgence transparaît : comment transformer les résolutions en résultats tangibles ? Les débats, nourris par des expériences locales parfois méconnues, ont révélé des défis communs. Un délégué de l’Est de la RDC a partagé l’histoire de ces jeunes filles utilisées comme boucliers humains dans les conflits armés, tandis qu’un collègue malien évoquait le rôle crucial des femmes dans la médiation communautaire. Ces récits croisés dessinent une Afrique à deux vitesses, tiraillée entre violence et résilience.
La question financière a surgi comme un serpent de mer. « Avec des délégations venant de 30 pays, qui paiera la facture ? », interroge une participante congolaise. Les organisateurs promettent une gestion transparente, s’appuyant sur des partenariats avec ONG et gouvernements. Mais sur le terrain, le scepticisme persiste. À Goma, où des centaines de jeunes survivent grâce à des petits boulots, Fatou, 24 ans, lance : « Ils parlent de sommets, mais ici on a besoin de formations et de kits pour créer des coopératives. »
L’ombre de la résolution 1325 de l’ONU plane sur ces discussions. Adoptée il y a près de 25 ans, cette texte historique sur les femmes, la paix et la sécurité reste-t-elle un vœu pieux en RDC et ailleurs ? Les statistiques sont têtues : selon un récent rapport de l’Union Africaine, seuls 15% des processus de paix incluent des femmes comme médiatrices principales. Le sommet de 2025 ambitionne de briser ce plafond de verre grâce à des « coalitions d’action » concrètes.
Mais comment éviter l’écueil des déclarations d’intention ? Les organiseurs misent sur une innovation : des « laboratoires de solutions » où jeunes entrepreneurs et activistes co-construiront des projets avec des décideurs. Une approche qui séduit Nancy Clémence Tshimueneka, activiste de Kinshasa : « Enfin une occasion de présenter nos initiatives locales, comme ces réseaux de femmes qui désamorcent les conflits fonciers grâce à la médiation traditionnelle. »
Pourtant, des voix s’élèvent pour critiquer le calendrier. « Pourquoi attendre 2025 quand des communautés brûlent aujourd’hui ? », s’indigne un blogueur béninois. Les organisateurs rétorquent que ce temps permettra de construire une participation massive, notamment dans les zones rurales souvent oubliées des grands rendez-vous internationaux.
Au-delà des polémiques, une certitude émerge : ce sommet cristallise les espoirs d’une génération connectée mais souvent exclue des arènes décisionnelles. Alors que la RDC prépare des élections cruciales, l’enjeu dépasse les frontières. Et si la clé de la paix en Afrique centrale se trouvait dans l’énergie de sa jeunesse et le leadership silencieux de ses femmes ? Réponse dans seize mois – à condition que les promesses survivent aux réalités politiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd