Dans une région où les conflits armés et les déplacements massifs ont fragilisé l'accès aux soins, l'intervention de l'UNFPA dans la zone de santé de Nyiragongo soulève un espoir concret : réduire le nombre de mères et de nouveau-nés emportés par des complications évitables. Le don de matériel médical remis ce vendredi au Centre de santé de Turunga n'est pas qu'un geste humanitaire de plus. C'est une bouée de sauvetage pour une population où seulement 27% des accouchements bénéficient d'une assistance qualifiée, selon les chiffres officiels.
Une course contre la montre face aux décès évitables
Le kit d'urgence comprend des équipements pour le suivi des grossesses à risque, des kits d'accouchement stériles et des traitements contre les infections sexuellement transmissibles. Un appui vital quand on sait que 11 décès maternels sur 26 recensés annuellement dans la zone surviennent en dehors des structures sanitaires. « Imaginez une femme forcée d'accoucher dans un camp de déplacés, sans eau potable ni compresses stériles », interpelle un médecin local sous couvert d'anonymat.
L'action cible aussi la prise en charge des violences sexuelles, fléau amplifié par l'instabilité. « Les 72 premières heures après un viol sont cruciales pour prévenir le VIH ou les grossesses non désirées », rappelle Tolotra Andriamanana de l'UNFPA. Le centre pourra désormais administrer des prophylaxies d'urgence et un soutien psychologique.
Des chiffres qui cachent une urgence humaine
Derrière le taux de mortalité maternelle de 37 pour 100 000 naissances se cachent des réalités peu médiatisées. « Beaucoup de femmes parcourent 15 km à pied, contractions au ventre, sous la menace des groupes armés », témoigne une sage-femme. Le conflit M23 a drastiquement réduit l'accès aux 18 structures sanitaires que comptait la zone avant la guerre.
Le Dr Shukuru Turano Thierry insiste sur l'effet domino de cette aide : « Un simple kit de réanimation néonatale peut sauver 5 nourrissons par mois. Avec les nouveaux équipements, nous visons zéro décès lié aux hémorragies post-partum ».
Prévention : Un combat à plusieurs fronts
Si l'apport matériel est essentiel, les défis persistent. Comment convaincre les femmes d'accoucher en structure quand les routes sont contrôlées par des milices ? L'UNFPA mise sur un réseau d'ambulances communautaires et la formation des accoucheuses traditionnelles. « Chaque naissance assistée réduit de 40% les risques de complications », précise un rapport interne.
La leçon est claire : en contexte de crise prolongée, renforcer les systèmes de santé exige bien plus que des dons ponctuels. Il faut des circuits d'approvisionnement résilients et une couverture sanitaire mobile pour les déplacés. Comme le souligne un partenaire local : « Aider Turunga aujourd'hui, c'est éviter que Goma ne soit submergée demain par des malades évacués ».
Ce que cela change pour les femmes au quotidien
Pour Marie, déplacée de Rutshuru rencontrée devant le centre, l'impact est concret : « Avant, on accouchait sur des nattes avec une lampe-torche. Maintenant, mes deux filles enceintes auront droit à des compresses propres et un monitoring ». Un progrès fragile, mais réel.
Autorités et ONG doivent maintenant garantir que ces intrants ne soient pas détournés ou pillés – risque réel en zone conflictuelle. La promesse du médecin-chef de gérer les ressources « en bon père de famille » devra être surveillée par la société civile.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
