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Nord-Kivu : À Beni, la Journée du Travail sous le signe de l’insécurité et des taxes étouffantes – Les travailleurs résistent, mais jusqu’à quand ?

Dans les rues de Beni, ce 1er mai 2024, les drapeaux claquent sous un soleil accablant, mais les sourires des travailleurs cachent une amertume tenace. Queen Bendela, gérante d’un restaurant local, esquisse un geste vers son établissement : « D’abord, je suis fière d’être travailleuse… mais l’insécurité nous laisse sans mots ». Comme elle, des centaines d’ouvriers, artisans et fonctionnaires célèbrent une Journée du Travail teintée de résignation. Derrière les discours officiels, une réalité s’impose : comment valoriser le labeur dans une région où balafres de guerre et taxes arbitraires rongent l’économie ?

Le Nord-Kivu, épicentre de crises sécuritaires récurrentes, présente un paradoxe saisissant. D’un côté, une population déterminée à « gagner sa vie dignement », selon les mots d’un vendeur de rue croisé au marché central. De l’autre, un climat des affaires étouffé par les attaques armées et les barrières fiscales ubuesques. « Nos clients ont peur de sortir le soir. Les livraisons ? Un casse-tête permanent à cause des checkpoints », soupire Queen Bendela, les yeux rivés sur sa cuisine aux murs décrépis.

La colère monte surtout contre la multiplication des taxes, véritable épine dans le pied de l’entrepreneuriat local. Abdou Shakir, cordonnier au quartier Malepe, exhibe ses mains calleuses : « Même avec mon handicap, ils exigent paiement sur paiement. Où est la protection promise ? ». Une plainte récurrente dans cette ville où près de 60% des commerçants déclarent subir des prélèvements illégaux, selon une récente enquête de la société civile.

Cette situation pose une question cruciale : comment expliquer que dans une province riche en ressources naturelles, les travailleurs doivent choisir entre nourrir leur famille et payer des « frais de sécurité » fantômes ? Les autorités provinciales se défendent en évoquant « des efforts pour simplifier la fiscalité », mais sur le terrain, les perceptions divergent. Un collectif de syndicats dénonce même « une économie de la prédation » qui découragerait 3 startups sur 5 dans les six premiers mois d’existence.

Pourtant, l’espoir persiste à travers des initiatives locales. Des coopératives agricoles contournent l’insécurité en organisant des convois groupés pour les marchandises. Certains artisans handicapés, comme Abdou, ont créé des réseaux d’entraide pour mutualiser le paiement des taxes. « Si l’État ne vient pas à nous, nous devenons notre propre solution », lance-t-il, un demi-sourire aux lèvres.

Mais jusqu’où peut tenir cette résilience ? Alors que le chômage frappe 70% des jeunes de la région selon la Banque Mondiale, chaque fermeture de boutique alimente le cercle vicieux de l’économie informelle. Les travailleurs interpellent aujourd’hui les décideurs : la paix et une fiscalité équitable ne sont-elles pas les premières pierres d’un véritable développement ? À Beni comme ailleurs en RDC, le combat pour la dignité du travail se joue désormais sur deux fronts : celui des armes… et celui des calculatrices.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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