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Grands Lacs : La valse diplomatique de l’UE face à l’urgence d’une paix introuvable à l’Est de la RDC

Dans un ballet diplomatique où chaque pas est scruté à la loupe, l’Ambassadeur Johan Borgstam, Représentant spécial de l’Union européenne (UE) dans la région des Grands Lacs, a posé ses valises à Kinshasa après une étape à Brazzaville. Une visite éclair de 48 heures, mais lourde de symboles, alors que l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) reste englué dans un cycle de violences que les multiples initiatives peinent à enrayer. Entre réaffirmation des soutiens internationaux et scepticisme latent sur l’efficacité des mécanismes de médiation, quel souffle nouveau cette tournée européenne insuffle-t-elle réellement ?

Le discours de l’UE, porté par M. Borgstam, s’articule autour d’un leitmotiv désormais familier : soutien aux « processus de Luanda et de Nairobi », appel à la « mise en œuvre rapide » des engagements, et plaidoyer pour une coordination régionale sous l’égide de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC). Des mantras repris dans le communiqué européen du 30 avril 2025, où l’ambassadeur insiste sur la nécessité de « préserver les acquis » tout en pressant les parties prenantes à s’engager « de manière substantielle ». Une formulation qui, sous couvert de langue de bois institutionnelle, trahit une certaine impatience face à la lenteur des progrès.

Les rencontres kinoises du diplomate européen ont épousé la géométrie variable du pouvoir congolais. De la Première Ministre Judith Suminwa Tuluka au Haut Représentant pour la feuille de route de Luanda, Sumbu Sita Mambu, en passant par le conseiller spécial à la Sécurité présidentielle, M. Kolongele Eberande, cette litanie d’entretiens dessine les contours d’un dialogue à multiples étages. Mais au-delà des déclarations d’intention, comment interpréter le timing de cette visite, concomitante avec la séquence diplomatique de Doha ?

Mercredi 30 avril, tandis que Kinshasa recevait l’émissaire européen, Doha accueillait une réunion cruciale rassemblant délégations congolaises, rwandaises et facilitateurs internationaux. Objectif affiché : consolider les avancées de la déclaration de Washington du 25 avril, où Kigali et Kinshasa ont esquissé les bases d’un possible cessez-le-feu. Un calendrier serré qui culmine avec la présentation, ce 2 mai à Washington, d’un projet d’accord définitif. L’UE, par la voix de Borgstam, se positionne ici en soutien discret mais vigilant, rappelant au passage son récent pont aérien humanitaire vers Goma – un million d’euros déployés comme preuve tangible de son implication.

Mais derrière cette façade unitaire, les fissures persistent. La référence répétée au « respect de la souveraineté des États », présente dans les conclusions de Doha, sonne comme un avertissement voilé à l’endroit du Rwanda, régulièrement accusé de soutenir le M23. Quant à la médiation togolaise conduite par Faure Gnassingbé, elle introduit un nouvel acteur dans un paysage déjà encombré d’initiatives concurrentes. L’UE parviendra-t-elle à harmoniser ces dynamiques parallèles, ou risque-t-elle de se heurter au syndrome habituel de la « fatigue diplomatique » ?

La question humanitaire, abordée par Borgstam lors de sa rencontre avec le CICR et MSF, rappelle cruellement l’enjeu sous-jacent à ces joutes protocolaires : deux millions de déplacés dans l’Est congolais, des besoins criants en aide d’urgence, et un accès humanitaire entravé par les combats. Si l’UE brandit son pont aérien comme preuve de son engagement, certains observateurs murmurent que ces gestes, bien que nécessaires, ne sauraient remplacer une solution politique durable.

Alors que la région retient son souffle avant l’échéance washingtonienne, une interrogation subsiste : cette cascade de déclarations, sommets et feuilles de route aboutira-t-elle enfin à un changement de paradigme ? Ou ne sommes-nous pas simplement témoins d’une nouvelle chorégraphie diplomatique, où chaque acteur joue sa partition sans jamais vraiment dissoner ? La réponse se niche peut-être dans le subtil avertissement de Borgstam : « Préserver les acquis » suppose d’abord qu’il y ait des acquis à préserver…

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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