L’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) est une fois de plus le théâtre de manœuvres politiques troubles, où les anciens seigneurs de guerre semblent jouer aux échecs avec la stabilité régionale. Yves Kahwa Panga, figure controversée de l’Ituri et ancien chef de guerre, a fustigé la création de la « Coalition pour la révolution populaire » (CRP) par Thomas Lubanga, qualifiant cette initiative de « pire escroquerie politique ». Cette sortie médiatique intervient alors que la région reste fragile, minée par des décennies de conflits et d’instabilité.
De retour d’exil en Ouganda, Kahwa Panga, autrefois redouté pour son implication dans les milices locales, affirme aujourd’hui vouloir répondre à l’appel du président congolais pour la paix. « Je suis obligé de venir prêter main forte au gouvernement », a-t-il déclaré, dans un revirement qui interroge autant qu’il surprend. Cette déclaration suit sa rencontre avec le gouverneur de l’Ituri, où il a promis de collaborer avec les autorités pour contrer toute tentative de déstabilisation, notamment autour du littoral du lac Albert.
Mais derrière ces professions de foi en faveur de la paix, se cachent des enjeux politiques complexes. Kahwa Panga accuse Lubanga, condamné par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre, de chercher à « semer le chaos » pour s’imposer comme interlocuteur incontournable dans d’éventuelles négociations. « Il crée une situation pour être reconnu comme un groupe armé, afin de participer aux tables de négociations et glaner sa part du gâteau », a-t-il asséné, avec une franchise déconcertante.
Cette guerre des mots entre anciens rebelles soulève des questions cruciales sur la crédibilité des processus de paix en RDC. Si Kahwa Panga se présente aujourd’hui en défenseur de l’ordre établi, son passé trouble invite à la prudence. Quant à Lubanga, son retour sur le devant de la scène politique, via cette nouvelle rébellion alliée au M23, rappelle que les vieux démons de l’Est congolais sont loin d’être exorcisés.
La population de l’Ituri, prise en étau entre ces calculs politico-militaires, reste la première victime de ces manœuvres. Kahwa Panga l’a reconnu lui-même : « Il trompe nos frères qui croient qu’il ramènera la paix ». Reste à savoir si cette prise de position tardive suffira à contrecarrer les ambitions de Lubanga, ou si elle ne fait que compliquer davantage un paysage sécuritaire déjà extrêmement fragmenté.
Alors que Kinshasa tente de stabiliser la région, ces déclarations croisées révèlent les limites d’une approche qui intègre d’anciens rebelles dans le processus de paix. Entre opportunisme politique et velléités de rédemption, la route vers la pacification de l’Est congolais s’annonce encore longue et semée d’embûches.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
