La République Démocratique du Congo achève l’année 2025 sur une note historique en matière de stabilisation monétaire. Avec un dollar américain échangé à moins de 2 200 francs congolais et un taux d’inflation annuel contenu à 2,3%, le pays enregistre des performances macroéconomiques qui contrastent radicalement avec sa réputation passée de fragilité. Cette transformation, qualifiée par de nombreux analystes de « retournement sans précédent », interroge : s’agit-il d’une simple embellie conjoncturelle ou de l’amorce d’un nouveau cycle de résilience économique pour la nation ?
Le cœur de cette métamorphose réside dans l’action décisive de la Banque Centrale du Congo (BCC). Sous l’égide de son gouverneur, André Wameso, l’institution a abandonné son rôle d’observateur passif pour devenir l’ancre active de la stabilité. La politique monétaire congolaise a été redéfinie autour d’une quadrature d’objectifs : une gestion rigoureuse de la liquidité en monnaie nationale pour juguler les pressions sur les prix, des interventions ciblées sur le marché des changes pour lisser la volatilité excessive, une coordination renforcée avec la politique budgétaire afin de réduire le financement monétaire du déficit, et une communication transparente pour restaurer la confiance des agents économiques.
Ce cocktail de mesures techniques, souvent qualifié d’orthodoxe mais appliqué avec une fermeté nouvelle, a produit des effets tangibles. Le franc congolais, longtemps otage de la spéculation et de la fuite vers le dollar, a retrouvé une crédibilité inédite. Cette vigueur retrouvée n’est pas qu’un indicateur abstrait ; elle se traduit déjà dans l’économie réelle par une détente des prix des biens importés, une amélioration relative du pouvoir d’achat dans les centres urbains et une meilleure visibilité pour les entreprises, notamment celles dont la chaîne d’approvisionnement dépend de l’extérieur. La baisse soutenue du cours du dollar agit comme un baume sur une économie fortement dollarisée.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : une inflation 2025 à 2,3% représente un niveau historiquement bas pour la RDC, souvent confrontée à des spirales inflationnistes à deux chiffres. Ce contrôle des prix, couplé à la maîtrise du taux de change, constitue le double marqueur d’une politique monétaire crédible. Pour André Wameso et son équipe, le succès tient autant aux décisions techniques qu’au signal politique fort envoyé aux marchés : la défense de la monnaie nationale est une priorité non-négociable. Ce signal a progressivement modifié les comportements, réduisant la prophétie auto-réalisatrice de la dépréciation et encourageant la reconversion vers le franc congolais.
Cependant, cette stabilisation monétaire RDC reste un édifice à consolider. L’économie nationale demeure structurellement dépendante des cours des matières premières, source de vulnérabilité aux chocs externes. La dollarisation, bien qu’en recul, persiste dans les mentalités et les transactions importantes. Enfin, les pressions budgétaires, souvent tentées de recourir à la planche à billets, représentent un risque permanent. La véritable réussite de la BCC sera de maintenir ce cap dans la durée, en ancrant des anticipations positives durables.
En définitive, l’année 2025 marque un tournant psychologique et institutionnel. Elle démontre que la politique monétaire congolaise, lorsqu’elle est conduite avec discipline et prévisibilité, peut être un levier efficace de gouvernance économique. Le pari de la stabilisation monétaire, longtemps considéré comme un objectif théorique hors de portée, est en train de devenir une réalité tangible. La question qui se pose désormais est de savoir si cette nouvelle crédibilité pourra servir de fondation à une diversification plus large de l’économie, réduisant sa vulnérabilité aux cycles des commodités. La performance de la BCC ouvre une fenêtre d’opportunité ; c’est à l’ensemble des acteurs économiques et politiques d’en profiter pour bâtir une croissance plus inclusive et résiliente.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
